31 mai 2008
HORTEFEUX S'EN VA-T-EN GUERRE. CONTRE LE RACISME ? NON... CONTRE LE MIR !!!
30 mai 2008
Adresse aux initiateurs du NPA
Adresse aux initiateurs du NPA - une tribune publiée dans Le Monde du 05/05/08 par Clémentine Autain, Michel Onfray, Luc Boltanski, Elisabeth Claverie, Frédéric Lebaron, Arnaud Viviant
C'est un texte qui fait penser que, malgré l'ironie des uns et les rancunes des autres, il est possible de faire un pas vers une convergence des différentes forces antilibérales et anticapitalistes dans ce pays. Mais ce n'est qu'une possibilité. Pour qu'elle se réalise, il faudra notamment que la LCR se décide à discuter sérieusement avec l'ensemble des acteurs du mouvement, et non seulement avec ceux qui sont d'accord avec le calendrier et les conditions de la mise en place du Nouveau parti anticapitaliste. Et qu'elle nous donne plus de précisions sur la délimitation possible de ce parti qui doit selon moi réunir des militants révolutionnaires et non-révolutionnaires à partir du moment où ils acceptent un programme minimum de revendications dont il faudra discuter d'urgence le contenu.
Il faudra également que des antilibéraux arrêtent de caricaturer la position des révolutionnaires - qu'ils soient "trotskistes" ou pas - pour lesquels la révolution ne se réduit pas à un mythique "Grand Soir". (Personnellement, quand Besancenot dit qu'il n'est pas trotskiste et qu'il invente une nouvelle catégorie "guévaro-libertaire', je trouve ça plutôt inquiétant.) De la même façon, opposer les notions de "force de proposition" et "force de contestation" comme si ces deux pôles de l'action politique étaient mutuellement incompatibles ne me semble pas une bonne façon d'entamer le débat.
Enfin, peut-on enfin en finir avec cette tendance à opposer les "héros du quotidien" ou les "anonymes" (dont le principal intérêt pour la direction de la LCR est qu'ils ont très peu de références théoriques et politiques) à tous ces militants membres ou issus de différents courants politiques, syndicaux et du mouvement social qui font vivre l'opposition à Sarkozy et ont souvent derrière eux des années de militantisme désintéressé. Les 6 000 signataires de l'Appel de Politis sont-ils tous des fainéants ? C'est de la pure démagogie, camarades de la majorité de la Ligue.
Cet article dans Le Monde du 31 mai aide à mieux comprendre le positionnement de Besancenot qui prétend que le réformisme n'existe plus.
C'est à mon avis plus un slogan - efficace peut-être à court terme - qu'une analyse sérieuse. Les révolutionnaires se trompent toujours quand ils se désintéressent à l'état de la gauche traditionnelle sous le prétexte que le capitalisme n'a plus besoin d'elle ou que les travailleurs l'ont délaissée.
Des millions de travailleurs ne font plus certes confiance à cette gauche de compromission (les derniers sondages sur les intentions de vote pour le New Labour en Grande-Bretagne sont à cet égard accablants), mais ce n'est pas pour autant qu'ils ont renoncé définitivement à l'idée qu'il vaut mieux améliorer même de façon marginale le système actuel que le détruire pour en construire un nouveau type de société.
Il ne s'agit pas, comme Besancenot semble le dire, de penser que la seule voie pour l'extrême gauche est de "passer par les organisations traditionnelles", mais de garder une orientation sérieuse sur les organisations de masse (même affaiblies), tout en conservant une indépendance politique totale vis-à-vis de leurs directions.
Et cette interview de Clémentine Autain dans Libération :
Ici, la réponse de la LCR à la tribune de Clémentine Autain et al ...
C'est un texte qui fait penser que, malgré l'ironie des uns et les rancunes des autres, il est possible de faire un pas vers une convergence des différentes forces antilibérales et anticapitalistes dans ce pays. Mais ce n'est qu'une possibilité. Pour qu'elle se réalise, il faudra notamment que la LCR se décide à discuter sérieusement avec l'ensemble des acteurs du mouvement, et non seulement avec ceux qui sont d'accord avec le calendrier et les conditions de la mise en place du Nouveau parti anticapitaliste. Et qu'elle nous donne plus de précisions sur la délimitation possible de ce parti qui doit selon moi réunir des militants révolutionnaires et non-révolutionnaires à partir du moment où ils acceptent un programme minimum de revendications dont il faudra discuter d'urgence le contenu.
Il faudra également que des antilibéraux arrêtent de caricaturer la position des révolutionnaires - qu'ils soient "trotskistes" ou pas - pour lesquels la révolution ne se réduit pas à un mythique "Grand Soir". (Personnellement, quand Besancenot dit qu'il n'est pas trotskiste et qu'il invente une nouvelle catégorie "guévaro-libertaire', je trouve ça plutôt inquiétant.) De la même façon, opposer les notions de "force de proposition" et "force de contestation" comme si ces deux pôles de l'action politique étaient mutuellement incompatibles ne me semble pas une bonne façon d'entamer le débat.
Enfin, peut-on enfin en finir avec cette tendance à opposer les "héros du quotidien" ou les "anonymes" (dont le principal intérêt pour la direction de la LCR est qu'ils ont très peu de références théoriques et politiques) à tous ces militants membres ou issus de différents courants politiques, syndicaux et du mouvement social qui font vivre l'opposition à Sarkozy et ont souvent derrière eux des années de militantisme désintéressé. Les 6 000 signataires de l'Appel de Politis sont-ils tous des fainéants ? C'est de la pure démagogie, camarades de la majorité de la Ligue.
Cet article dans Le Monde du 31 mai aide à mieux comprendre le positionnement de Besancenot qui prétend que le réformisme n'existe plus.
C'est à mon avis plus un slogan - efficace peut-être à court terme - qu'une analyse sérieuse. Les révolutionnaires se trompent toujours quand ils se désintéressent à l'état de la gauche traditionnelle sous le prétexte que le capitalisme n'a plus besoin d'elle ou que les travailleurs l'ont délaissée.
Des millions de travailleurs ne font plus certes confiance à cette gauche de compromission (les derniers sondages sur les intentions de vote pour le New Labour en Grande-Bretagne sont à cet égard accablants), mais ce n'est pas pour autant qu'ils ont renoncé définitivement à l'idée qu'il vaut mieux améliorer même de façon marginale le système actuel que le détruire pour en construire un nouveau type de société.
Il ne s'agit pas, comme Besancenot semble le dire, de penser que la seule voie pour l'extrême gauche est de "passer par les organisations traditionnelles", mais de garder une orientation sérieuse sur les organisations de masse (même affaiblies), tout en conservant une indépendance politique totale vis-à-vis de leurs directions.
Et cette interview de Clémentine Autain dans Libération :
LIBERATION : Si le dialogue s’installe, seriez-vous prête à un rapprochement avec le NPA?
CLEMENTINE AUTAIN : Notre état d’esprit est constructif. La LCR a une part de responsabilité dans l’échec de la candidature unitaire antilibérale à la dernière présidentielle. Mais les torts sont partagés. Nous avons tenté de construire un rassemblement par des accords politiques entre des forces constituées. Ça n’a pas marché. Une nouvelle séquence politique s’ouvre. Compte tenu de l’écho rencontré par Olivier Besancenot dans l’opinion publique, les initiateurs du NPA ont une responsabilité particulière dans la période, à fermer ou à ouvrir. S’il fait l’impasse sur le mélange des traditions culturelles et politiques de gauche, si les militants communistes, écolos et ex-socialistes ne se retrouvent pas dans le NPA, cela ne marchera pas. Il est donc important de dialoguer avec eux.
Ici, la réponse de la LCR à la tribune de Clémentine Autain et al ...
Libellés : Anticapitalisme
27 mai 2008
French protests shake up Sarkozy|31May08|Socialist Worker
Voile: ce sont celles qui le portent qui en parlent le mieux | Rue89
Voile: ce sont celles qui le portent qui en parlent le mieux | Rue89
Lisez cet article puis lisez tous les commentaires pour comprendre le chemin qu'il y a faire pour convaincre la majorité de nos citoyens (et surtout ceux qui prétendent être de gauche) que les femmes et filles voilées qui vivent et voudraient travailler en France ne sont pas une menace pour la civilisation occidentale (ou les "valeurs républicaines" ...).
Lisez cet article puis lisez tous les commentaires pour comprendre le chemin qu'il y a faire pour convaincre la majorité de nos citoyens (et surtout ceux qui prétendent être de gauche) que les femmes et filles voilées qui vivent et voudraient travailler en France ne sont pas une menace pour la civilisation occidentale (ou les "valeurs républicaines" ...).
Libellés : Islamophobie
24 mai 2008
Comment faire émerger une force politique alternative ...
... à la gauche d'une social-démocratie de plus en plus 'social-libérale' ? Il est devenu clair au fil des années que cette question doit être résolue afin d'ouvrir de nouvelles perspectives à une population de plus en plus agacée par une alternance 'droite'/'gauche' qui ne fait qu'aggraver tous les problèmes sociaux (de pouvoir d'achat, de logement, de transports, de retraites, de précarité ...).
Dans cette situation, tous les courants politiques sérieux de la gauche radicale sont amenés à se remettre en cause et à nouer de nouvelles alliances. Ainsi, en Allemagne, les anciens communistes staliniens se sont transformés peu à peu en sociaux-démocrates de gauche s'alliant ici et là avec le SPD social-libéral, tout en participant à un nouveau parti (Die Linke) qui comprend des éléments issus des luttes syndicales contre les politiques néo-libérales des grands partis (CDU-CSU-SPD), du mouvement écologiste, de la gauche révolutionnaire etc.
De la même façon, la majorité des groupes d'extrême gauche - à l'exception de ceux, de plus en plus marginaux, qui continuent à essayer de construire "patiemment" leurs propres organisations - se trouvent aujourd'hui membres de différents regroupements, qu'ils soient de nouveaux partis, des coalitions ou des fronts électoraux. Avec souvent des résultats encourageants mais aussi des problèmes. Comment participer à une force politique (plus ou moins) large sans perdre de vue la nécessité, non pas de "révolutionner la société" (selon une formule malheureuse utilisée par la LCR française), mais de faire une révolution ?
Les marxistes unitaires ont raison d'insister que, en règle générale, cette nouvelle force ne pourra pas se former autour d'une seule organisation, même quand celle-ci change radicalement de tactique, comme c'est le cas de la LCR. Aucune tendance politique n'a une telle hégémonie qu'elle puisse attirer vers elle l'immense majorité des militants syndicaux, politiques et des différents mouvements sociaux qui, sur leur lieu de travail, dans leur quartier ou leur communauté, forment la véritable avant-garde du mouvement de transformation sociale.
Nous devons donc appuyer toute tentative de fusionner ces militants, sans décréter par avance la forme que doit prendre la nouvelle force. A Socialisme International nous soutenons la mise en place d'un Nouveau parti anticapitaliste (NPA) avec les militants de la LCR et d'autres, mais cela ne nous empêche pas d'appuyer d'autres initiatives, comme celle lancée par la rédaction de Politis sous la forme d'un 'Appel à gauche'. Je ne suis personnellement pas d'accord, par exemple, avec Raoul-Marc Jennar, qui considère, après l'avoir signé, que celui-ci est essentiellement une diversion pour affaiblir le NPA.
Il nous faut également suivre avec intérêt ce qui se passe dans d'autres pays. Il existe par exemple un pays où l'évolution de la gauche radicale semble contredire ce que je viens d'écrire. Il s'agit des Pays-Bas, où le Parti socialiste (SP) (ex-maoiste) semble avoir pris une place hégémonique dans la gauche radicale - et réussi une percée électorale significative. A tel point que la question de la participation gouvernementale n'est plus un simple sujet de débat. C'est en tout cas ce qu'écrit Peter Drucker dans cet article publié sur le site de la LCR belge.
Dans cette situation, tous les courants politiques sérieux de la gauche radicale sont amenés à se remettre en cause et à nouer de nouvelles alliances. Ainsi, en Allemagne, les anciens communistes staliniens se sont transformés peu à peu en sociaux-démocrates de gauche s'alliant ici et là avec le SPD social-libéral, tout en participant à un nouveau parti (Die Linke) qui comprend des éléments issus des luttes syndicales contre les politiques néo-libérales des grands partis (CDU-CSU-SPD), du mouvement écologiste, de la gauche révolutionnaire etc.
De la même façon, la majorité des groupes d'extrême gauche - à l'exception de ceux, de plus en plus marginaux, qui continuent à essayer de construire "patiemment" leurs propres organisations - se trouvent aujourd'hui membres de différents regroupements, qu'ils soient de nouveaux partis, des coalitions ou des fronts électoraux. Avec souvent des résultats encourageants mais aussi des problèmes. Comment participer à une force politique (plus ou moins) large sans perdre de vue la nécessité, non pas de "révolutionner la société" (selon une formule malheureuse utilisée par la LCR française), mais de faire une révolution ?
Les marxistes unitaires ont raison d'insister que, en règle générale, cette nouvelle force ne pourra pas se former autour d'une seule organisation, même quand celle-ci change radicalement de tactique, comme c'est le cas de la LCR. Aucune tendance politique n'a une telle hégémonie qu'elle puisse attirer vers elle l'immense majorité des militants syndicaux, politiques et des différents mouvements sociaux qui, sur leur lieu de travail, dans leur quartier ou leur communauté, forment la véritable avant-garde du mouvement de transformation sociale.
Nous devons donc appuyer toute tentative de fusionner ces militants, sans décréter par avance la forme que doit prendre la nouvelle force. A Socialisme International nous soutenons la mise en place d'un Nouveau parti anticapitaliste (NPA) avec les militants de la LCR et d'autres, mais cela ne nous empêche pas d'appuyer d'autres initiatives, comme celle lancée par la rédaction de Politis sous la forme d'un 'Appel à gauche'. Je ne suis personnellement pas d'accord, par exemple, avec Raoul-Marc Jennar, qui considère, après l'avoir signé, que celui-ci est essentiellement une diversion pour affaiblir le NPA.
Il nous faut également suivre avec intérêt ce qui se passe dans d'autres pays. Il existe par exemple un pays où l'évolution de la gauche radicale semble contredire ce que je viens d'écrire. Il s'agit des Pays-Bas, où le Parti socialiste (SP) (ex-maoiste) semble avoir pris une place hégémonique dans la gauche radicale - et réussi une percée électorale significative. A tel point que la question de la participation gouvernementale n'est plus un simple sujet de débat. C'est en tout cas ce qu'écrit Peter Drucker dans cet article publié sur le site de la LCR belge.
Libellés : Anticapitalisme, Pays-Bas
23 mai 2008
Appel Politis : un appel d’air
Appel Politis : un appel d’air, par Christian Picquet
Près de 5000 signatures en huit jours… Sans le renfort des médias qui, à peu d’exceptions près, ont ignoré l’événement… C’est peu dire que l’appel initié par Politis, « L’alternative à gauche, organisons-la ! » , recueille un très large écho. À ce rythme et avec cet accueil, la barre des 10 000 signataires peut être franchie dans les prochaines semaines.
Pour parler autrement, cette initiative est intervenue au bon moment. Alors que l’explosivité sociale dans le pays ne trouve strictement aucun répondant sur le champ politique. Que le Parti socialiste, force dominante par défaut à gauche, se balkanise en un pitoyable affrontement dont le seul enjeu perceptible consiste à savoir qui gouvernera le parti en vue de la présidentielle de 2012. Que, signant une évolution qui a déjà conduit la rue de Solferino à ne même plus incarner une opposition de fond aux projets du clan au pouvoir, un nombre non négligeable de ses parlementaires se prépare – ils viennent de l’écrire dans une tribune du Monde – à sauver la réforme constitutionnelle par laquelle Nicolas Sarkozy entend présidentialiser un peu plus la V° République. Que le challenger de Ségolène Royal pour la magistrature suprême, Bertrand Delanoë, ne trouve à s’identifier, dans son dernier ouvrage, que dans un éloge remarqué à la « concurrence » et à la « compétition », se fixant en quelque sorte pour horizon d’achever la mue sociale-libérale de sa famille politique. Que toutes les autres composantes de la gauche sont devenues pratiquement inexistantes (ou, du moins, inaudibles), à l’exception de la LCR et de son projet de « nouveau parti anticapitaliste », lequel ne peut cependant, à lui seul, à offrir aux mobilisations le débouché politique crédible qui leur permettrait de relever le défi de l’épreuve de force centrale avec le régime./.../
Libellés : Anticapitalisme
21 mai 2008
Vague meurtrière de xénophobie en Afrique du Sud
NOUVEAU (24 MAI) Manifestation à Johannesburg contre les violences xénophobes ...
Les violences tragiques dans certains townships de l'Afrique du Sud sont une conséquence des politiques néolibérales suivies par les dirigeants régionaux. Mais ceux-ci ne font pour la plupart qu'appliquer les politiques voulues par les Etats, les multinationales et les institutions du système capitaliste mondialisé. Ce qui est sûr, c'est que quand des pauvres s'attaquent à ceux qui sont encore plus pauvres qu'eux, cela ne présage rien de bon. Sur le terrain, cependant, la résistance s'organise, contredisant l'idée reçue que la violence serait inscrite dans les gènes des peuples africains.
Voici un article en anglais de Ken Olende sur le même sujet dans l'hebdomadaire britannique Socialist Worker: South African activists call for solidarity ....
Voir par exemple cette déclaration de l'Anti Privatisation Forum
Mbeki appelle au calme (AFP) ... mais changera-t-il de politique ?
D'autres informations sont publiées sur le site très intéressant de l'IRIN (il s'agit d'une agence de l'ONU spécialisée dans l'action humanitaire)
Les violences tragiques dans certains townships de l'Afrique du Sud sont une conséquence des politiques néolibérales suivies par les dirigeants régionaux. Mais ceux-ci ne font pour la plupart qu'appliquer les politiques voulues par les Etats, les multinationales et les institutions du système capitaliste mondialisé. Ce qui est sûr, c'est que quand des pauvres s'attaquent à ceux qui sont encore plus pauvres qu'eux, cela ne présage rien de bon. Sur le terrain, cependant, la résistance s'organise, contredisant l'idée reçue que la violence serait inscrite dans les gènes des peuples africains.
Voici un article en anglais de Ken Olende sur le même sujet dans l'hebdomadaire britannique Socialist Worker: South African activists call for solidarity ....
Voir par exemple cette déclaration de l'Anti Privatisation Forum
Stop the xenophobic attacks in Alexandra!
TUESDAY 13 MAY 2008 : DON’T BLAME THE POOR FROM OTHER COUNTRIES FOR THE POVERTY AND JOBLESSNESS IN SOUTH AFRICA - BLAME, AND ACT AGAINST, THOSE WHO ARE RESPONSIBLE!
Mbeki appelle au calme (AFP) ... mais changera-t-il de politique ?
D'autres informations sont publiées sur le site très intéressant de l'IRIN (il s'agit d'une agence de l'ONU spécialisée dans l'action humanitaire)
Libellés : Afrique, Afrique du Sud
18 mai 2008
Manifestations et grèves tous azimuts sur le front social - Yahoo! Actualités
AFP/THOMAS COEX
Manif des enseignants, Paris, 18 mai 2008
L'objectif initial – 10 000 participants - a été révisé à la hausse après le tollé provoqué chez les syndicats enseignants par la volonté de Nicolas Sarkozy d'imposer avant l'été par la loi le service minimum d'accueil (SMA) dans les écoles et l'obligation pour les enseignants grévistes de se déclarer 48 heures avant tout arrêt de travail.
Libellés : Luttes ouvrières
16 mai 2008
'Droit de grève' et 'service minimum'
Grèves en France et en Angleterre. Le but du 'service minimum' est de rendre les luttes ouvrières invisibles et inaudibles.
Le Parti Socialiste et les syndicats dénoncent l'idée d'imposer un 'service minimum' comme 'une atteinte au droit de grève'. Ce n'est pas tout-à-fait exact. La véritable distinction n'est pas entre ceux qui défendent le droit de grève et ceux qui sont contre. Presque personne en France aujourd'hui n'est contre le droit de grève.
Ecoutez Sarkozy : lui-même est pour le droit de grève. Seulement, il est contre le fait de l'exercer. Et surtout pour que, si des grèves ont lieu, elles n'aient aucun impact. Lui, et ceux qui sont d'accord avec cela, veulent que quand les enseignants font grève, les écoles s'ouvrent ; quand les cheminots font grève, les trains roulent ; quand les postiers font grève, le courrier soit livré (surtout aux entreprises) ...
Ou, comme disait un révolutionnaire anglais décédé, si les travailleurs dans une fabrique de glâces ont des revendications, il faut surtout qu'ils attendent le milieu de l'hiver pour se mettre en grève. Le meilleur moment pour que les profs fassent grève, c'est évidemment pendant les congés scolaires. Et ainsi de suite.
Cela s'appelle vouloir briser des grèves sans en avoir l'air - au nom bien sûr des 'usagers' ou des 'enfants'. Ces gens-là se fichent complètement des intérêts des usagers et des enfants. Sinon ils seraient en train d'augmenter les budgets et les effectifs dans les services publics, au lieu de faire le contraire.
Le même principe s'applique à d'autres droits. Nous possédons tous (à l'exception des résidents étrangers, bien sûr) le droit de vote. Mais il ne faut surtout pas que les élections puissent changer la vie des gens. Quant à la liberté d'expression, cela existe - sauf que la plupart des médias appartiennent à un petit groupe de gens très riches. (C'est un peu aussi comme le droit religieux pour certains 'républicains'. Tout le monde y compris les musulmans a le droit d'avoir une croyance religieuse, mais il faut surtout pas que cela se voie.) Dans ce que les marxistes appellent une démocratie bourgeoise, le vrai pouvoir réside dans les hautes sphères de l'administration, dans les conseils d'administration des grandes entreprises etc.
Les droits démocratiques sont importants - à condition d'abord de pouvoir les exercer pleinement, et ensuite que leur exercice soit suivi d'effets. Dans beaucoup de cas, ces droits sont entièrement vidés de sens, tant le pouvoir de l'argent, celui d'influencer l'opinion (les grands médias) et en dernière analyse le pouvoir étatique (police, armée, prisons ...) déterminent toute la direction de la politique.
Contre cela, nous ne défendons pas seulement le droit de faire grève, mais nous militons pour qu'ils soit utilisé le plus souvent et le plus efficacement possible. Ce qui n'est pas le cas du Parti Socialiste et de la majorité des dirigeants syndicaux, qui eux pensent et disent de plus en plus que c'est par la négociation à froid et le partenariat social avec les patrons que la condition des salariés, des chômeurs, des étudiants etc sera améliorée. (A ce propos, ne peut-on pas faire campagne pour interdire l'utilisation du terme 'partenaires sociaux' ? Depuis quand les patrons sont-ils des 'partenaires' des travailleurs ? Remplaçons-le obligatoirement par 'adversaires sociaux' ou 'ennemis de classe'. Ce serait beaucoup plus réaliste.)
Libellés : Luttes ouvrières
14 mai 2008
L’ALTERNATIVE À GAUCHE, ORGANISONS-LA !
Nous célébrons l’anniversaire de Mai 68.
Le temps n’est toutefois ni aux commémorations, ni à la nostalgie.
La planète s’est profondément transformée. Le capitalisme se fait toujours plus prédateur. Les émeutes de la faim sont le corollaire de l’enrichissement indécent d’une minorité de privilégiés. Les crises financières s’enchaînent et une catastrophe écologique se dessine. Bousculée par un nouveau totalitarisme de marché, la démocratie s’étiole.
C’est à la refondation d’une politique d’émancipation qu’il importe de s’atteler.
En France, le sarkozysme se heurte déjà à la résistance du pays. Dans les entreprises du secteur privé, dans les services publics, à l’école, d’amples mobilisations se font jour.
À quarante ans de distance, deux questions se reposent à nous : quelles perspectives offrir à la colère sociale ? Comment la volonté de changer radicalement l’ordre des choses peut-elle redonner majoritairement le ton à gauche ?
À cet égard, chacun hélas peut le constater, il manque toujours une force incarnant un projet alternatif.
Des anticapitalistes manifestent en Espagne. L'opposition au néolibéralisme se développe dans beaucoup de pays. Mais elle a besoin d'une expression politique.
Du côté de la majorité dirigeante du Parti socialiste, les volontés hégémoniques se confirment, et avec elles les tendances au renoncement social-libéral, inspirées des exemples de MM. Blair ou Prodi. Mais la gauche de transformation sociale et écologiste ne doit pas, elle, s’accommoder d’un statu quo qui lui interdit d’espérer changer en profondeur la donne politique.
La menace du bipartisme devient plus forte, avec son choix mortifère ramené à deux variantes de l’adaptation au libéralisme. Tout cela peut nous conduire à des désastres comme celui que vient de connaître la gauche italienne, incapable d’empêcher le retour de Berlusconi aux affaires et littéralement disloquée.
Les municipales et les cantonales viennent pourtant de prouver qu’il existe ici un espace comparable à celui révélé par Die Linke en Allemagne ou d’autres expériences similaires en Europe. Faute de convergence entre des traditions et des cultures jusqu’ici séparées, faute de prendre en compte l’apport des mouvements sociaux et citoyens ayant émergé depuis plusieurs années, le champ des possibles demeurera inévitablement limité : aucune force constituée ne peut rassembler autour d’elle seule.
Les échecs passés nous instruisent des difficultés de l’entreprise. Nous n’en restons pas moins convaincus que c’est le seul horizon porteur d’avenir.
Un cadre permanent pour faire front
Nous en appelons donc à l’affirmation d’une gauche enfin à gauche. Qui n’oublie plus la nécessité de redistribuer les richesses. Qui soit en phase avec les aspirations des salariés, avec ou sans papiers, des quartiers populaires, des jeunes. Qui conjugue urgence sociale, urgence démocratique et urgence écologique. Qui permette au peuple d’exercer sa souveraineté dans tous les domaines. Qui place l’égalité entre hommes et femmes au cœur de son projet. Qui milite pour un nouveau mode de production et de consommation, soutenable et respectueux des équilibres écologiques. Qui promeuve la construction d’une autre Europe et des rapports de codéveloppement avec le Sud. Qui devienne, ce faisant, une véritable force.
Militants politiques, acteurs du mouvement social et culturel, nous pouvons dès à présent agir de façon coordonnée. Sans préalable sur les engagements des uns et des autres, construisons un cadre permanent qui nous permette, ensemble, nationalement et localement, de réfléchir aux moyens d’une vraie réponse politique aux attaques de la droite et du Medef et d’aborder les grands rendez-vous qui s’annoncent. D’ici l’été, que chacun et chacune se saisisse de cette proposition sur le terrain. Et retrouvons-nous à l’occasion d’un grand rendez-vous national en septembre, afin de prolonger ces échanges.
Premiers signataires :
Paul Ariès, Ariane Ascaride, François Asensi, Clémentine Autain, Christophe Barbillat, Francine Bavay, Hamida Bensadia, Pierre Bergougnoux, Jacques Bidet, Martine Billard, Jean-Jacques Boislaroussie, Patrick Braouezec, Bernard Calabuig, Yves Contassot, Eric Coquerel, Emmanuelle Cosse, Thomas Coutrot, Claude Debons, Bernard Defaix, Marc Dolez, Annie Ernaux, Jean-Claude Gayssot, Jacques Généreux, Susan George, Dominique Grador, Robert Guediguian, Michel Husson, Raoul-Marc Jennar, François Labroille, Frédéric Lebaron, Jacques Lerichomme, Philippe Mangeot, Roger Martelli, François Maspero, Gérard Mauger, Marion Mazauric, Daniel Mermet, Mohammed Mechmache, Philippe Meyrieu, Claude Michel, Yann Moulier-Boutang, Dominique Noguères, Michel Onfray, Christian Picquet, Christophe Ramaux, Yves Salesse, Denis Sieffert, Patrick Silberstein, Evelyne Sire-Marin, Emmanuel Terray, Rémy Toulouse, Marcel Trillat, Christophe Ventura, Marie-Pierre Vieu, Claire Villiers.
Pour signer l'appel : www.appel-a-gauche.org
De son côté, La LCR annonce que Le nouveau parti anticapitaliste sera lancé fin 2008 : "On tient nos dates et nos délais" (O. Besancenot)
Le temps n’est toutefois ni aux commémorations, ni à la nostalgie.
La planète s’est profondément transformée. Le capitalisme se fait toujours plus prédateur. Les émeutes de la faim sont le corollaire de l’enrichissement indécent d’une minorité de privilégiés. Les crises financières s’enchaînent et une catastrophe écologique se dessine. Bousculée par un nouveau totalitarisme de marché, la démocratie s’étiole.
C’est à la refondation d’une politique d’émancipation qu’il importe de s’atteler.
En France, le sarkozysme se heurte déjà à la résistance du pays. Dans les entreprises du secteur privé, dans les services publics, à l’école, d’amples mobilisations se font jour.
À quarante ans de distance, deux questions se reposent à nous : quelles perspectives offrir à la colère sociale ? Comment la volonté de changer radicalement l’ordre des choses peut-elle redonner majoritairement le ton à gauche ?
À cet égard, chacun hélas peut le constater, il manque toujours une force incarnant un projet alternatif.
Des anticapitalistes manifestent en Espagne. L'opposition au néolibéralisme se développe dans beaucoup de pays. Mais elle a besoin d'une expression politique.
Du côté de la majorité dirigeante du Parti socialiste, les volontés hégémoniques se confirment, et avec elles les tendances au renoncement social-libéral, inspirées des exemples de MM. Blair ou Prodi. Mais la gauche de transformation sociale et écologiste ne doit pas, elle, s’accommoder d’un statu quo qui lui interdit d’espérer changer en profondeur la donne politique.
La menace du bipartisme devient plus forte, avec son choix mortifère ramené à deux variantes de l’adaptation au libéralisme. Tout cela peut nous conduire à des désastres comme celui que vient de connaître la gauche italienne, incapable d’empêcher le retour de Berlusconi aux affaires et littéralement disloquée.
Les municipales et les cantonales viennent pourtant de prouver qu’il existe ici un espace comparable à celui révélé par Die Linke en Allemagne ou d’autres expériences similaires en Europe. Faute de convergence entre des traditions et des cultures jusqu’ici séparées, faute de prendre en compte l’apport des mouvements sociaux et citoyens ayant émergé depuis plusieurs années, le champ des possibles demeurera inévitablement limité : aucune force constituée ne peut rassembler autour d’elle seule.
Les échecs passés nous instruisent des difficultés de l’entreprise. Nous n’en restons pas moins convaincus que c’est le seul horizon porteur d’avenir.
Un cadre permanent pour faire front
Nous en appelons donc à l’affirmation d’une gauche enfin à gauche. Qui n’oublie plus la nécessité de redistribuer les richesses. Qui soit en phase avec les aspirations des salariés, avec ou sans papiers, des quartiers populaires, des jeunes. Qui conjugue urgence sociale, urgence démocratique et urgence écologique. Qui permette au peuple d’exercer sa souveraineté dans tous les domaines. Qui place l’égalité entre hommes et femmes au cœur de son projet. Qui milite pour un nouveau mode de production et de consommation, soutenable et respectueux des équilibres écologiques. Qui promeuve la construction d’une autre Europe et des rapports de codéveloppement avec le Sud. Qui devienne, ce faisant, une véritable force.
Militants politiques, acteurs du mouvement social et culturel, nous pouvons dès à présent agir de façon coordonnée. Sans préalable sur les engagements des uns et des autres, construisons un cadre permanent qui nous permette, ensemble, nationalement et localement, de réfléchir aux moyens d’une vraie réponse politique aux attaques de la droite et du Medef et d’aborder les grands rendez-vous qui s’annoncent. D’ici l’été, que chacun et chacune se saisisse de cette proposition sur le terrain. Et retrouvons-nous à l’occasion d’un grand rendez-vous national en septembre, afin de prolonger ces échanges.
Premiers signataires :
Paul Ariès, Ariane Ascaride, François Asensi, Clémentine Autain, Christophe Barbillat, Francine Bavay, Hamida Bensadia, Pierre Bergougnoux, Jacques Bidet, Martine Billard, Jean-Jacques Boislaroussie, Patrick Braouezec, Bernard Calabuig, Yves Contassot, Eric Coquerel, Emmanuelle Cosse, Thomas Coutrot, Claude Debons, Bernard Defaix, Marc Dolez, Annie Ernaux, Jean-Claude Gayssot, Jacques Généreux, Susan George, Dominique Grador, Robert Guediguian, Michel Husson, Raoul-Marc Jennar, François Labroille, Frédéric Lebaron, Jacques Lerichomme, Philippe Mangeot, Roger Martelli, François Maspero, Gérard Mauger, Marion Mazauric, Daniel Mermet, Mohammed Mechmache, Philippe Meyrieu, Claude Michel, Yann Moulier-Boutang, Dominique Noguères, Michel Onfray, Christian Picquet, Christophe Ramaux, Yves Salesse, Denis Sieffert, Patrick Silberstein, Evelyne Sire-Marin, Emmanuel Terray, Rémy Toulouse, Marcel Trillat, Christophe Ventura, Marie-Pierre Vieu, Claire Villiers.
Pour signer l'appel : www.appel-a-gauche.org
De son côté, La LCR annonce que Le nouveau parti anticapitaliste sera lancé fin 2008 : "On tient nos dates et nos délais" (O. Besancenot)
Libellés : Anticapitalisme
12 mai 2008
Le grand saxophoniste Gilad Atzmon à Paris le 16 mai
11 mai 2008
Le facteur chez Drucker
NOUVEAU (26 juin 2008) : Olivier Besancenot devant ses juges médiatiques (sur le site d'Acrimed)
L'émission de Drucker avec Olivier Besancenot selon Reuters.
Bon, je n'ai pas tout regardé, mais ce que j'ai vu ne m'a pas fait changé d'avis. Je ne dis pas qu'il ne faut jamais participer à ce type d'émission. Il y avait des arguments pour. Besancenot devait "profiter d'une tribune" pour s'adresser à des millions de téléspectateurs et "faire la promotion" (le terme est malheureux) du nouveau parti anticapitaliste. A-t-il réussi ? A-t-il meme essayé ? En tout cas, suivant le principe même de l'émission, on a eu beaucoup sur Olivier Besancenot lui-même.
Le problème est que cette émission en particulier et son animateur-vedette projettent une image très forte qui, si on ne fait pas attention, colle forcément à l'invité. Besancenot est bien rentré dans le moule, se prêtant à tous les petits rituels qui font le charme de Drucker et répondant gentiment à des questions percutantes du genre "Et que faisiez-vous les dimanches quand vous étiez jeune ?"
On a bien eu droit à des reportages sur ses loisirs et sa tournée des potes et beaucoup de questions sur ses parents et son enfance. Chez Drucker, la famille est une valeur sure. Sur le racisme, nous avons eu droit à la petite main de SOS-Racisme et le très 'républicain' Devoirs de Mémoire (quelqu'un a parlé de la "communauté nationale"). Les interventions d'Alain Krivine n'ont pas tranché non plus avec l'ambiance un peu soporifique d'un dimanche après-midi chaud.
Musicalement, le choix d'inviter les deux chanteurs de l'ex-Zebda était bon, et Bernard Lavilliers pas mal. L'invitation faite à deux footballeurs très populaires, Franck Ribéry et Willy Sagnol, était moins heureuse, étant donné qu'ils n'avaient rien à dire à part que Besancenot était jeune et nouveau (!). On aurait préféré Lilian Thuram qui a d'excellentes idées et tape toujours très fort.
Christiane Taubira a loué les mérites de Besancenot de façon presque romantique et lui a prédit un bel avenir de parlementaire, sans qu'il ne bronche. Il est vrai que chez Drucker il faut toujours rester poli et dire le plus grand bien du maximum de personnes, et que Taubira est très populaire. Pour cela, Besancenot a été encore une fois un "bon client". Il y a eu quand même un moment fort, quand une ouvrière a parlé des mauvaises conditions du travail, les dangers de l'amiante et les salaires. J'en ai certainement raté d'autres.
Pour Arlette Laguiller, qui a été l'invitée de Drucker il y a dix ans, l'émission n'est pas dans le genre "people". Aujourd'hui, pour moi, cela y ressemblait beaucoup. Besancenot est vraiment très fort dans les débats contradictoires ou en face-à-face avec des journalistes politiques. Vivement Dimanche est un exemple du consensus bien-pensant, ce qui explique que si l'on se plie à toutes ses règles on se donne une image plutot ... consensuelle.
Voir sur Marianne2.fr : Seguela donne le baiser de la mort à Besancenot
Un petit compte-rendu dans Rouge, l'hebdo de la LCR
Et encore une fois, pour une critique radicale des médias, voir et participer au site d'ACRIMED ...
L'émission de Drucker avec Olivier Besancenot selon Reuters.
Bon, je n'ai pas tout regardé, mais ce que j'ai vu ne m'a pas fait changé d'avis. Je ne dis pas qu'il ne faut jamais participer à ce type d'émission. Il y avait des arguments pour. Besancenot devait "profiter d'une tribune" pour s'adresser à des millions de téléspectateurs et "faire la promotion" (le terme est malheureux) du nouveau parti anticapitaliste. A-t-il réussi ? A-t-il meme essayé ? En tout cas, suivant le principe même de l'émission, on a eu beaucoup sur Olivier Besancenot lui-même.
Le problème est que cette émission en particulier et son animateur-vedette projettent une image très forte qui, si on ne fait pas attention, colle forcément à l'invité. Besancenot est bien rentré dans le moule, se prêtant à tous les petits rituels qui font le charme de Drucker et répondant gentiment à des questions percutantes du genre "Et que faisiez-vous les dimanches quand vous étiez jeune ?"
On a bien eu droit à des reportages sur ses loisirs et sa tournée des potes et beaucoup de questions sur ses parents et son enfance. Chez Drucker, la famille est une valeur sure. Sur le racisme, nous avons eu droit à la petite main de SOS-Racisme et le très 'républicain' Devoirs de Mémoire (quelqu'un a parlé de la "communauté nationale"). Les interventions d'Alain Krivine n'ont pas tranché non plus avec l'ambiance un peu soporifique d'un dimanche après-midi chaud.
Musicalement, le choix d'inviter les deux chanteurs de l'ex-Zebda était bon, et Bernard Lavilliers pas mal. L'invitation faite à deux footballeurs très populaires, Franck Ribéry et Willy Sagnol, était moins heureuse, étant donné qu'ils n'avaient rien à dire à part que Besancenot était jeune et nouveau (!). On aurait préféré Lilian Thuram qui a d'excellentes idées et tape toujours très fort.
Christiane Taubira a loué les mérites de Besancenot de façon presque romantique et lui a prédit un bel avenir de parlementaire, sans qu'il ne bronche. Il est vrai que chez Drucker il faut toujours rester poli et dire le plus grand bien du maximum de personnes, et que Taubira est très populaire. Pour cela, Besancenot a été encore une fois un "bon client". Il y a eu quand même un moment fort, quand une ouvrière a parlé des mauvaises conditions du travail, les dangers de l'amiante et les salaires. J'en ai certainement raté d'autres.
Pour Arlette Laguiller, qui a été l'invitée de Drucker il y a dix ans, l'émission n'est pas dans le genre "people". Aujourd'hui, pour moi, cela y ressemblait beaucoup. Besancenot est vraiment très fort dans les débats contradictoires ou en face-à-face avec des journalistes politiques. Vivement Dimanche est un exemple du consensus bien-pensant, ce qui explique que si l'on se plie à toutes ses règles on se donne une image plutot ... consensuelle.
Voir sur Marianne2.fr : Seguela donne le baiser de la mort à Besancenot
Un petit compte-rendu dans Rouge, l'hebdo de la LCR
Et encore une fois, pour une critique radicale des médias, voir et participer au site d'ACRIMED ...
L'esclavage et le développement du capitalisme
Le 10 mai la France a commémoré officiellement l'esclavage. Nicolas Sarkozy a solenellement dénoncé celui-ci comme un "crime contre l'humanité" et a annoncé que dorénavant l'histoire de l'esclavage sera enseigné à l'école primaire. "Pas trop tot", pourrait-on dire. Il serait peut-etre temps également d'inscrire l'enseignement de l'histoire des peuples noirs au programme de l'enseignement secondaire, tout comme la littérature africaine, antillaise etc en tant que telle (et non pas comme une branche de l'histoire ou de la littérature française) - ainsi évidemment que d'autres études des peuples et minorités opprimés.
Ce qu'on n'explique pas, c'est comment le commerce des esclaves a pu etre pratiqué si longtemps dans une France dont le meme Sarkozy n'arrete pas de nous dire qu'il faut etre "fier". L'esclavage était-il une simple "abérration" ou était-il au contraire à la base meme du développement économique du pays ? Comment se fait-il qu'un mode de production si barbare a pris une tellle importance dans un des pays les plus avancés au monde, sans parler de la Grande-Bretagne ou les Etats-Unis qui avaient des économies encore plus "modernes" ? Enfin, quel est le rapport entre l'esclavage et le racisme qui perdure et que nos dirigeants économiques, politiques, intellectuels et médiatiques commencent tout juste à reconnnaitre comme enraciné et institutionnalisé au sein de la société française ?
Je reproduis ici le chapitre 3 du livre d' Alex Callinicos Racisme et lutte des classes qu'on peut lire en entier ici ...
Le racisme tel que nous le connaissons aujourd'hui s'est développé au cours d'une phase-clé du développement du capitalisme en tant que mode de production dominant à l'échelle mondiale - l'établissement aux XVIIème et XVIIIème siècles de plantations coloniales dans le Nouveau Monde, utilisant une main-d’œuvre servile importée d’Afrique pour produire des biens de consommation tels que le tabac et le sucre, et des matières premières industrielles comme le coton pour le marché mondial. Peter Fryer a retracé son développement en Angleterre : « Le racisme est apparu dans la tradition orale des Barbades au XVIIème siècle et s’est manifesté sous la forme de publications en Grande-Bretagne au XVIIIème, comme l'idéologie de la « plantocratie », la classe de planteurs de sucre et de marchands d'esclaves qui dominaient les colonies anglaises aux Caraïbes ». L'exemple le plus influent de cette idéologie est celui fourni par l'Histoire de la Jamaïque (1774) d'Edward Long, mais déjà en 1753 le grand philosophe écossais David Hume, un des géants du Siècle des Lumières, déclarait : « Je suis porté à soupçonner les nègres, et en général toutes les autres espèces des hommes (car il en existe quatre ou cinq différentes), d’être naturellement inférieures aux blancs ».
Le développement de ce que Robin Blackburn appelle « l’esclavage systémique » dans les plantations d'Amérique du Nord et des Indes Occidentales, qui a nécessité la déportation de pas moins de 6 millions de captifs africains dans le seul XVIIIème siècle, est l'un des plus grands crimes du capitalisme. Cela dit, il est courant d'entendre dire que c'est l'existence préalable du racisme qui a rendu possible l'exploitation des esclaves africains. Cette interprétation est contestée par Eric Williams dans son étude classique du sujet : « L'esclavage n'est pas né du racisme; bien au contraire, le racisme a été la conséquence de l'esclavage. Le travail non-libre dans le Nouveau Monde était brun, blanc, noir et jaune ; catholique, protestant et païen ».
En effet, les économies des plantations étaient fondées au départ sur le travail servile de blancs, sous la forme de serviteurs contractuels qui acceptaient de servir comme esclaves pendant trois ou cinq ans en échange de leur voyage d’Europe. Selon Blackburn:
Plus de la moitié des émigrants blancs dans les colonies d'Amérique du Nord arrivaient comme serviteurs sous contrat (« indentured servants »); les Caraïbes françaises et anglaises absorbèrent des dizaines de milliers de ces travailleurs, qui pouvaient être achetés moins cher que des esclaves. Près de 350.000 de ces serviteurs furent expédiés dans les colonies britanniques jusque dans les années 1770.
Barbara Fields indique que les plantations de tabac de la Virginie coloniale « reposaient principalement sur le dos de serviteurs sous contrat anglais et non d'esclaves africains » jusqu'à la fin du XVIIème siècle :
Les serviteurs sous contrat travaillaient plus longtemps en Virginie que leurs compatriotes anglais et jouissaient de moins de respect et de protection légale et coutumière. Ils pouvaient être achetés et vendus comme du bétail, enlevés, volés, joués aux cartes, et attribués - même avant leur arrivée en Amérique - à des plaideurs qui avaient gagné leur procès. Des patrons cupides (si le terme n'est pas un pléonasme) réduisaient la nourriture des serviteurs, les privaient de leur pécule de libération, et souvent de leur liberté elle-même lorsqu'ils avaient fini leur temps. Ils étaient battus, estropiés, et même tués impunément.
Comme l'observe Fields, « la seule dégradation qui était épargnée (aux serviteurs blancs) était l'esclavage perpétuel ». C'était leur principal désavantage pour les propriétaires soucieux de s'assurer une main d’œuvre stable à long terme afin de satisfaire la demande croissante de produits coloniaux. Mais, comme l'explique Fields, ce n'était pas la couleur de leur peau qui épargnait aux serviteurs sous contrat l'esclavage total, mais les limites au pouvoir des propriétaires imposées par « des siècles de lutte quotidienne, ouverte ou cachée, armée ou désarmée, pacifique ou violente » entre exploiteurs et exploités en Angleterre :
Transformer les serviteurs en esclaves de façon massive aurait aggravé notablement la lutte permanente, une entreprise périlleuse si l'on considère que les serviteurs étaient bien armés et plus nombreux que leurs maîtres, et que les Indiens auraient pu facilement profiter du conflit sévissant chez leurs ennemis. Au surplus, la transformation des nouveaux immigrants en esclaves, une fois connue en Angleterre, aurait menacé de tarir la source de l'immigration future. Même le profiteur le plus rapace et le moins scrupuleux pouvait prévoir le désastre dont était porteuse une telle politique.
La solution aux problèmes de main d’œuvre des planteurs fut fournie, à partir des années 1680, « par l'importation de travailleurs africains en nombre croissant », qui « rendait possible le maintien d'une quantité suffisante de travailleurs dans les plantations sans accumuler la charge explosive constituée par des Anglais armés, mécontents de se voir dénier les droits des Anglais et disposant des moyens matériels et politiques de faire connaître leur mécontentement ». Le racisme se développa dans le contexte créé par le développement de « l'esclavage systémique » du Nouveau Monde : l’idée que les Africains étaient (selon les mots de Hume) « naturellement inférieurs » aux Blancs justifiait qu’on leur déniât les « droits des Anglais » et qu’on les réduisît en esclavage.
Mais cela soulève une autre question. Pourquoi était-il nécessaire de justifier l'esclavage ? Cela peut sembler une question étrange, jusqu'à ce que nous considérions l'autre modèle historique majeur de société basée sur l'esclavage, à savoir l'antiquité classique. Ellen Wood écrit :
Certains seront peut-être surpris d'apprendre que dans la Grèce antique et à Rome, malgré l'acceptation quasi universelle de l'esclavage, l’idée qu'il était justifié par des inégalités naturelles parmi les êtres humains n'eut jamais le moindre crédit. La seule exception notable, la conception d'Aristote d'un esclavage naturel, ne connut aucun développement. Le point de vue le plus courant semble avoir été que l'esclavage était une convention qui ne se justifiait que par son utilité. En réalité, on allait jusqu'à admettre que cette institution, quoique utile, était contraire à la nature. Une telle conception n’apparaît pas seulement dans la philosophie mais était même reconnue par la loi romaine. Il a même été suggéré que l'esclavage était le seul cas du droit romain dans lequel il y avait un conflit avéré entre le jus gentium, la loi conventionnelle des nations, et le jus naturale, la loi de la nature.
Comment se fait-il que les idéologues grecs et romains n'aient pas jugé utile de construire une justification élaborée de ce qu’ils reconnaissaient comme une institution « anti-naturelle » ? Pour répondre à cette question nous devons garder à l'esprit l'un des traits fondamentaux des sociétés pré-capitalistes, à savoir leur recours à ce que Marx appelle la « force extra-économique ». L'esclavage antique et le servage médiéval reposaient tous deux sur l'exploitation d’une force de travail non libre. L'esclave était réduit au statut d’un « outil parlant » (instrumentum vocale), comme disaient les Romains. Comme tel, l'esclave était totalement soumis au pouvoir physique de son maître, qui pouvait battre, violer, torturer et même tuer sa propriété. Cette soumission extrême d'un groupe humain à un autre reposait sur la puissance militaire des Cités-Etats grecques et de l'Empire romain, qui leur assurait un apport permanent d'esclaves. Le paysan féodal, qui jouissait de droits plus étendus et du contrôle d'un lopin de terre, était soumis à la puissance militaire et judiciaire du seigneur. Ce pouvoir permettait d'obliger le paysan à travailler pour le seigneur en exécutant les corvées, en cultivant les terres du seigneur une partie de la semaine, ou en lui livrant une portion de la récolte.
La nature de l'exploitation dans ces sociétés se reflétait dans l'organisation hiérarchique et la division de la population en groupes légalement inégaux - citoyen et esclave dans l'antiquité classique (et en fait les citoyens eux-mêmes étaient divisés en riches et pauvres), les états de l'Europe médiévale. L'inégalité sous une forme visible, systématique, sanctionnée par la loi était la norme dans les sociétés pré-capitalistes. Leurs idéologues ne doutaient de rien, et avaient tendance à décrire la société comme basée sur une division du travail dans laquelle même les plus humbles avaient leur rôle préétabli. Le fameux dialogue du philosophe grec Platon, La République, avec sa hiérarchie de Gardiens, Guerriers et Travailleurs, est la version occidentale classique de cette idéologie. Un autre exemple est celui cité par le grand philosophe arabe médiéval Ibn Khaldûn :
Le monde est un jardin dont le rempart est la dynastie. La dynastie est une autorité par laquelle vie est donnée au bon comportement. Le bon comportement est une politique dirigée par le souverain. Le souverain est une institution soutenue par les soldats. Les soldats sont des auxiliaires, qui sont entretenus avec de l'argent. L'argent est un moyen de subsistance apporté par les sujets. Les sujets sont des serviteurs protégés par la justice. La justice est quelque chose de familier, et grâce à elle le monde persiste. Le monde est un jardin...
Dans de telles sociétés hiérarchiques l'esclavage n'était qu'une nuance dans une gamme de statuts inégaux, qui n'avait besoin d'aucune explication particulière. Ce n'est pas le cas dans la société capitaliste. Car le mode de production capitaliste repose sur l'exploitation d’une main d’œuvre salariée libre. « Le travailleur salarié, dit Marx, est libre dans un double sens, libéré des anciens rapports de clientélisme, de soumission et de servitude, et, deuxièmement, de tous biens et possessions, et de toute forme objective et matérielle, libre de toute propriété ». Ce n'est pas une subordination légale et politique des travailleurs à l’exploiteur, mais leur séparation des moyens de production, et l'obligation qui en résulte pour eux de vendre leur seule ressource productive, la force de travail, qui est le fondement de l'exploitation capitaliste. Le travailleur et le capitaliste se rencontrent sur le marché du travail comme étant légalement égaux. Les travailleurs sont parfaitement libres de ne pas vendre leur force de travail : c’est seulement le fait que la seule alternative est la mort par inanition ou la queue des bureaux de chômage qui les amène à le faire. Par conséquent le marché du travail constitue, comme dit Marx, « un véritable jardin d'Eden des droits innés de l'homme » , « le royaume exclusif de la Liberté, de l'Egalité, de la Propriété, et de Bentham ». C’est seulement dans « la sphère cachée de la production » que se situe l'exploitation.
Ce contraste entre l’égalité formelle et l’inégalité réelle du capitaliste et du travailleur est un trait fondamental de la société bourgeoise, qui se reflète dans de nombreux aspects de son développement. Les grandes révolutions bourgeoises, qui ont balayé les obstacles à la domination du mode capitaliste de production, ont mobilisé les masses sous les bannières de la liberté et de l'égalité. « Le plus pauvre qui soit en Angleterre a une vie à vivre comme le plus grand, et donc... tout homme qui doit vivre sous un gouvernement devrait d'abord, de son propre consentement, se soumettre à ce gouvernement », disait le colonel Rainsborough dans les débats de Putney en 1647. « Nous tenons ces vérités comme allant de soi que tous les hommes ont été créés égaux, qu'ils sont nantis par leur Créateur de certains droits inaliénables, parmi lesquels la vie, la liberté, et la poursuite du bonheur », proclame la Déclaration d'Indépendance américaine de 1776. Sur le drapeau de la Révolution Française de 1789 était écrit : Liberté, Egalité, Fraternité.
Et cependant le paradoxe était que le capitalisme, dont la domination suppose l'exploitation du travail salarié, a bénéficié de façon gigantesque, durant une phase critique de son développement, de l'esclavage colonial. Cette relation se poursuivit bien avant dans l'ère de la révolution industrielle, les usines textiles anglaises utilisant une matière première en provenance des plantations esclavagistes du Sud américain. La dépendance du capitalisme par rapport au travail servile devint une anomalie, qui nécessitait une explication. C'est dans ce contexte que l’idée selon laquelle les Noirs étaient des sous-humains, et ne méritaient donc pas le respect de l’égalité qui était de plus en plus reconnue comme un droit de l’être humain, commença à s'installer.
Barbara Fields indique que « l’idéologie raciale » prit forme parmi les petits exploitants blancs (« the white yeomanry ») dans le Sud des USA - les petits fermiers et artisans qui, représentant près des deux tiers de la population de l’ « Old South », ne possédaient pour la plupart pas d'esclaves et cherchaient à affirmer leur indépendance politique et économique vis-à-vis des planteurs :
L'idéologie raciale fournit le moyen d'expliquer l'esclavage à des gens dont la terre était une république fondée sur des doctrines radicales de liberté et de droits naturels ; et, chose plus importante, une république dans laquelle ces doctrines semblaient représenter véritablement le monde où ils vivaient tous, à l'exception d'une minorité. C'est seulement lorsque le déni de la liberté devint une anomalie visible pour les moins observateurs et les moins critiques des membres de la société euro-américaine que l'idéologie s'employa systématiquement à expliquer cette anomalie.
De même, Peter Fryer montre comment le racisme est apparu dans la Grande-Bretagne du XVIIIème siècle « comme une idéologie essentiellement défensive – l’arme de la classe dont la richesse, le mode de vie et le pouvoir subissaient un assaut en règle ». Les idéologues racistes tels que Long défendirent dans leurs écrits les planteurs des Indes Occidentales contre les pressions croissantes visant à abolir, non pas seulement le commerce des esclaves, mais l'institution même du servage. Pourtant l'idéologie raciste survécut à l'abolition, et en fait bénéficia d'élaborations théoriques plus avancées au cours du XIXème siècle sous la forme de la biologie raciale pseudo-scientifique, qui se basait sur une approche vulgaire de la théorie darwinienne de la sélection naturelle. Cela reflétait le fait que l’anomalie qui avait donné naissance au racisme au départ continuait à exister sous une forme nouvelle, la domination du monde par une poignée de puissances européennes (ou européanisées, comme les USA et la Russie). Cet état de choses était justifié par l'idée selon laquelle la constitution biologique des Asiatiques et des Africains les destinait à être dirigés par les « races » blanches, dont c'était le devoir de gouverner le monde dans les intérêts de ses sujets. La forme classique de ce point de vue est le poème de Rudyard Kipling « The White Man's Burden » (« la charge de l'homme blanc »), écrit en 1898 comme un appel aux Etats-Unis, qui entamaient alors tout juste leur carrière de puissance impérialiste :
Prends en charge la mission de l’homme blanc -
Envoie les meilleurs de ceux que tu engendres -
Condamne tes enfants à l’exil
Pour les besoins de tes captifs;
A servir dans un lourd harnais
Sur des peuples mouvants et sauvages -
Tes peuples moroses, nouvellement capturés,
Moitié diables et moitié enfants.
(Take up the White Man's burden -
Send forth the best ye breed -
Go bind your sons to exile
To serve your captives' need;
To wait in heavy harness
On fluttered folk and wild -
Your new-caught, sullen peoples,
Half devil and half child.)
Pro-Palestinian rally through London
En ce soixantième anniversaire de l'expulsion des Palestiniens de leurs terres par les milices sionistes il y a eu des manifestations dans plusieurs pays, dont ce rassemblement à Londres filmé par Al-Jazeera.
Pour d'autres nouvelles de la Palestine et des luttes ouvrières en Egypte, un excellent source est le blog de Hossam al-Hamalawy qu'on peut visionner ici ....
Pour d'autres nouvelles de la Palestine et des luttes ouvrières en Egypte, un excellent source est le blog de Hossam al-Hamalawy qu'on peut visionner ici ....
Libellés : Palestine
10 mai 2008
Mai '68 : Petit récapitulatif chronologique
Cet article de Charles Paz dans Rouge nous rappelle les principaux évènements de mai-juin 1968.
La puissance du mouvement de Mai 68 est due au blocage politique qui a fait suite au coup d’État de 1958 et au blocage social face aux évolutions rapides de la société. Il est marqué par une combativité très forte, par l’apparition de la jeunesse scolarisée comme force sociale, par la rapidité du déclenchement de la grève générale et de l’explosion sociale. Si l’affrontement central avec le régime gaulliste est rapide, la retombée, en l’absence d’alternative politique, le sera tout autant.
Libellés : 1968
Indigènes de la république : 4ème commémoration des massacres du 8 mai 1945
Fête de Lutte Ouvrière, Presles (Val d'Oise), du 10 au 12 mai 2008
J'allais régulièrement tous les ans à la Pentecote à la très bucolique Fête de Lutte Ouvrière dans le Val d'Oise. J'y vais moins souvent maintenant. Mais cela reste une tradition fort sympathique. Contrairement à ce qu'on pourrait penser, elle est vraiment une fête populaire, avec un public très varié, dont de nombreuses familles ouvrières et immigrées de la région. Au fil des années, la cité politique est devenue moins intéressante, et les débats assez prévisibles. Mais j'encourage tous ceux qui ne la connaissent pas d'y aller, ne serait-ce que pour l'excellente bouffe faite par les militants de LO eux-memes et l'ambiance qui convient à toutes les générations. Pour y aller il y a des cars gratuits à partir du métro Saint-Denis Université (Ligne 13).
PARIS (Reuters) - La colère monte en France face à la politique injuste du gouvernement, estime Arlette Laguiller, porte-parole de Lutte ouvrière, dans un entretien à paraître samedi dans Le Parisien.
"J'espère une grande grève d'ensemble du monde du travail, comme on en a connu en mai-juin 1968. Le 22 mai sera un premier test", dit-elle en appelant les actifs, les chômeurs et les retraités à se mobiliser pour cette journée d'action sur les retraites.
"La colère monte car les sujets de mécontentements sont nombreux", ajoute-t-elle.
Interrogée sur la première année de présidence de Nicolas Sarkozy, Arlette Laguiller juge que "la politique qu'il mène consiste à prendre aux plus modestes pour donner aux plus riches".
"On nous dit que le gouvernement veut s'attaquer aux niches fiscales, pourquoi ne commence-t-il pas par supprimer ses propres mesures comme le bouclier fiscal à 50% ?", demande la porte-parole de LO.
"Au lieu de ça, l'Etat essaie de trouver de l'argent ou d'économiser par tous les moyens: les franchises médicales, les suppressions de postes dans l'éducation nationale, les sanctions contre les chômeurs... Et Nicolas Sarkozy, qui s'est doté d'une augmentation de 170% de son salaire, ose augmenter les retraites de 0,8% au 1er septembre ! On voit bien là qu'il y a des choix de classes", ajoute-t-elle.
Jean-Baptiste Vey
Pendant ce temps, Olivier Besancenot sera l'invité de l'émission de Michel Drucker sur France 2 (dimanche 11 mai). Le porte-parole de la LCR bénéficiera ainsi de plusieurs heures pour faire passer son message.
Fallait-il le faire ? Il y a bien sur des arguments pour : combien de fois peut-on entendre un militant trotskiste à la télévision dans d'aussi bonnes conditions ?
Face à des critiques venant de l'intérieur meme de la LCR, on nous promet que Besancenot restera maitre du contenu de l'émission.
Christian Picquet : Olivier est un excellent porte-parole. Le problème ne porte pas sur ses qualités individuelles mais sur la conception de la politique qu’il lui faut porter. Par exemple, il n’est pas forcément judicieux qu’il se rende chez Michel Drucker à la mi-mai comme invité vedette. Ce type d’émission ne contribue pas à la diffusion d’idées mais au contraire dépolitise l’espace public.
Personnellement, je reste sceptique. Non pas qu'il est interdit aux révolutionnaires de profiter des médias bourgeois, mais à cause de la forme meme de cette émission et l'ambiance bon enfant qui l'entoure. Le sympathique Drucker invite des gens de gauche, des gens de droite (à l'exception, il est vrai, de l'extreme droite), il présente une émission depuis le très gentil nouveau porte-avions de la flotte française - et il réussit le tour de force de rendre tout le monde aussi beau et aussi gentil que lui.
On nous promet que nous ne verrons pas d'images du facteur avec sa famille, mais on verra probablement le facteur en train de jouer au foot avec ses copains. En meme temps je suis sur qu'il invitera sur le plateau des militants ouvriers ou des sans-papiers en lutte et qu'il tapera fort sur Sarko et son gouvernement, ce qui tranchera avec le lot habituel d'invités venus promouvoir leur dernier film.
Le fond du problème est peut-etre que je trouve Besancenot lui-meme un personnage lisse dont l'image colle bien à ce type d'émission. Il a meme ses amis dans le show business, meme si cela s'appelle Joey Starr. Ses références politiques - Guevara ou le commandant Marcos plutot que Marx, Lénine ou Trotsky - sont également un point qui le rend plus acceptable à ceux dans les médias qui aiment croire qu'ils sont du coté du peuple et non des possédants.
On peut compter sur Besancenot, qui est très doué sur le plan de la communication, pour faire une excellente prestation. Peut-etre que son intervention encouragera plein de gens d'adhérer au nouveau parti anticapitaliste. Mais à quel prix ?
Pour une critique des médias, allez sur le site d'ACRIMED.
NOUVEAU (11 mai) L'émission de Drucker avec Olivier Besancenot selon Yahoo!News
Bon, je n'ai pas vu toute l'émission, mais ce que j'ai vu ne m'a pas fait changé d'avis. Je dis pas qu'il ne fallait pas y aller. Ce n'est pas une question de principe. Mais Besancenot est bien rentré dans le moule, répondant gentiment à toutes les questions lancinantes de Drucker du genre "Et que faisiez-vous les dimanches quand vous étiez jeune ?"
On a bien eu droit à des reportages sur ses loisirs et sa tournée des potes et beaucoup de questions sur ses parents et son enfance. Les interventions d'Alain Krivine n'ont pas tranché non plus avec cette ambiance un peu soporifique d'un dimanche après-midi chez Drucker.
Christiane Taupira a loué les talents d'Olivier et lui a prédit un bel avenir de parlementaire, sans qu'il ne réagisse. Il est vrai que dans cette émission il faut toujours resté poli et dire beaucoup de bien du maximum de personnes. Pour cela, Besancenot a été encore une fois un "bon client".
Il y avait quand meme un moment fort, quand une ouvrière a parlé des mauvaises conditions du travail, les dangers de l'amiante et les salaires.
Pour Arlette Laguiller, qui a été l'invitée de Drucker il y a dix ans, ce n'est pas une émission "people". Aujourd'hui, cela y ressemblait beucoup.
Libellés : LCR, Lutte Ouvrière
08 mai 2008
1968: The Year the World Caught Fire
1968: The Year the World Caught Fire, un long article de Chris Harman et une série de témoignages (Mike Davis, Michel Certano, Eamonn McCann et d'autres). (En anglais)
Libellés : 1968
Souvenirs de 1968
(Cet article est un travail en cours et écrit de mémoire. Il y a peut-être quelques erreurs.)
Il faut quand meme que je parle un peu de mon mai '68. Ou plutôt de toute cette période turbulente dont les mois de mai-juin français ne sont finalement qu'un moment.
En mai '68 (Louis Armstrong est au n° 1 avec What a Wonderful World) j'étais étudiant en Angleterre et déjà très politisé. Nous avons suivi avec beaucoup d'intéret ce qui se passait en France. J'ai le souvenir d'une réunion de cellule qui a eu dans ma propre chambre dans le grand appartement de Finchley Road à Londres que je co-louais avec cinq autres camarades. Je partageais la chambre avec un camarade qui fumait des Gaulloises au lit et allait devenir un spécialiste reconnu de la musique pop (Dylan, Buddy Holly notamment). On écoutait A Love Supreme de John Coltrane (sorti en 1964). La réunion a été animée par (je pense) un militant anarcho-syndicaliste anglais qui a été témoin des évènements. Mais nous n'avions pas attendu l'occupation de la Sorbonne pour militer.
Il y eut le mouvement contre la guerre au Vietnam. A Cambridge où j'ai fait mes études nous avons organisé quelques actions. Je me souviens d'une manifestation contre la projection du film Les bérets verts avec John Wayne dans un cinéma de la ville ; des étudiants de gauche y ont participé avec entre autres des pacifistes appartenant à l'église des Quakers, historiquement très présente dans cette région d'Angleterre.
Note : Le film étant sorti seulement en juin 1968 il s'agit d'une erreur de ma part. Ma mémoire n'est pas infaillible !
Une autre fois nous avons lancé l'idée d'une manif contre l'invitation faite par une association d'étudiants (Officers Training Corps) à un responsable d'une base militaire américaine (il y en a beaucoup dans l'Est de l'Angleterre). Etant allité à l'infirmerie j'ai preté ma chambre pour une réunion d'organisation. A sa grande surprise, le malade a reçu la visite de deux personnes (si mes souvenirs sont bons, un haut gradé de la police et un militaire) visiblement très inquiets et soucieux de connaître nos intentions. L'invitation a été annulée et nous avons gagné sans rien faire.
La première grande manifestation nationale eut lieu à Londres le 22 octobre 1967 (les Bee Gees sont au n° 1 avec Massachusetts) et donna lieu à des confrontations spectaculaires avec la police montée à Grosvenor Square devant l'ambassade américain (j'y étais et j'ai vu les chevaux de près). La Vietnam Solidarity Campaign a organisé deux autres grands rassemblements, en mars et octobre 1968. Mais nous avions d'autres raisons à manifester et à militer.
Quand on est militant révolutionnaire on est d'abord anti-raciste. Le mouvement pour les droits civiques aux Etats-Unis a eu une énorme influence. Les premières images des actualités dont je me souviens (à part le couronnement de la reine en 1953) sont celles des flics blancs de l'Alabama ou du Mississippi en train de tabasser des militants noirs. Les idées de Malcolm X étaient dans l'air et allaient bientôt pénétrer une partie de la jeunesse afro-caribéenne. Quelques années plus tard à Birmingham, j'ai assisté à un débat passionné entre militants noirs pour savoir si j'avais le droit - avec d'autres militants blancs - de rester dans la salle. Je ne leur en voulais pas.
A la meme époque (nous sommes au début des années 1970) nous avons été invités à une soirée chez un dirigeant de l'Association des Travailleurs indiens (Indian Workers' Association), Avtar Singh Jouhl. C'était un militant totalement dévoué à la cause et un allié très important dans la lutte contre l'extrême droite, qui avait bien sûr été formé politiquement en Inde. Tout trotskistes que nous étions, nous avons bien profité de la cuisine indienne, assises par terre, entourés de bustes et de portraits de Staline. Telles sont les contradictions du Front unique.
Les années 1950 vit en Grande-Bretagne un grand mouvement contre la menace nucléaire autour d'une revendication claire et nette : le désarmement nucléaire unilatéral (c'est-à-dire sans conditions) de la Grande-Bretagne. Je n'y ai pas particpé, mais il existait une section de la Campagne pour le désarmement nucléaire (CND) à Cambridge avec laquelle j'étais en contact.
En 1964, Harold Wilson (le Kennedy anglais, disait-on) mit fin aux "treize années perdues" de gouvernements conservateurs. Nous y croyions beaucoup, mais la désillusion vint vite. Wilson s'alignera de façon un peu honteuse sur la politique américaine au Vietnam, s'attaquera aux travailleurs de la marine marchande en grève ("un complot communiste"), tentera de limiter les salaires et de réduire le role des militants de base dans les syndicats et se révèlera impuissant face au coup d'Etat de la minorité de colons blancs en Rhodésie du Sud (aujourd'hui le Zimbabwe). J'ai fait campagne pour le Labour en 1964 à Birmingham et de nouveau en 1966 dans les fins fonds de la campagne du Cambridgeshire, mais ce sera la dernière fois. L'extrême gauche - essentiellement les International Socialists auxquels j'adhère - commençait à grandir et à gagner en confiance.
La radicalisation dans les universités commença bien avant mai '68. Même à Cambridge :
- Nous avons manifesté contre l'apartheid en Afrique du Sud et le régime d'Ian Smith en Rhodésie. Lors d'une manif très respectable, avec des représentants des églises, des étudiants sud-africains blancs membres d'un club de rugby ont fait une contre-manifestation et lancé des petits pains rassis (!).
J'ai conservé pendant des années une aversion particulière non seulement pour le rugby mais aussi pour l'accent sud-africain (que certains comparent à l'accent pas très joli de ma ville natale de Birmingham), malgré le fait que plusieurs de mes camarades, dont un de mes co-locataires, étaient des exilés blancs sud-africains. Ce dernier avait été fermier en brousse en Afrique du Sud, et trotskiste. Il nous a raconté comment son voisin le plus proche, à quelques kilomètres de là, était également trotskiste, mais appartenait à une autre tendance. (Cela semble etre trop beau pour etre vrai).
En 1967-68, un cortège organisé très rapidement est parti de la LSE pour aller au siège du gouvernement rhodésien à quelques centaines de mètres de là mais nous ne sommes jamais arrivés, la police étant plus rapide que nous. En voulant arracher un camarade des mains de la police j'ai été embarqué moi aussi. J'ai passé quelques heures au poste et payé une amende de deux livres (!). Ce qu'il faut savoir également est que la radicalisation des étudiants de la LSE devait beaucoup à la nomination au poste de directeur de cet établissement prestigieux d'un rhodésien du sud proche du régime rebelle et raciste d'Ian Smith. Un de nos camarades étudiants, un rhodésien d'origine indienne appelé Basker Vashee, a été le principal animateur de l'opposition à cette nomination.
- L'association des étudiants travaillistes de Cambridge (Labour Club) a scissionné sous les effets de la politique anti-ouvrière et pro-américaine du gouvernement de Harold Wilson. J'étais déjà proche de l'extrême gauche et en parallèle à nos activités de recrutement à l'association nous lisions des journaux révolutionnaires (Labour Worker, Militant ...) et assistions à des réunions avec des orateurs trotskistes (Nigel Harris, Tony Cliff ...). (Voir ici un article de Nigel Harris datant de l'automne 1968 intitulé Race and Nation)
Au début de l'année scolaire 1965-66 ou 1966-67 nous avons officiellement organisé une réunion de recrutement au Labour avec (je pense) le ministre Dennis Healey, un travailliste de droite très "droit dans ses bottes", comme invité. Après avoir assuré la sécurité du ministre et aidé à canalisé la foule, nombreuse, nous avons enlevé nos brassards et nous sommes entrés dans la salle pour manifester bruyamment pendant son discours. Pas très "fair-play", il est vrai. Une autre fois, le ministre des affaires étrangères, Michael Stewart, très pro-américain, a été la victime de nos agissements. Pris dans une bousculade et coincé dans un couloir étroit, il s'en est sorti indemne de justesse. Le Labour Club sera dissous par l'appareil travailliste, ce qui peut se comprendre, d'ailleurs.
- Nous avons commencé à contester la gestion encore très paternaliste de l'université par un professorat très traditionnaliste (il y avait encore une ségrégation entre les étudiants et les étudiantEs). J'ai aidé à créer une association éphémère à King's College qui s'appelait King's Left, ce qui m'a valu quelques manifestations d'hostilité de la part de certains étudiants abrutis issus des collèges privés comme Eton. Le directeur (Provost) de King's a par contre bien voulu venir dialoguer avec nous, dans ma chambre.
Des occupations (sit-ins) accompagnées de cours et de de débats alternatifs (teach-ins) ont eu lieu à partir de 1967, suivant le modèle des manifestations organisées sur les campus américains contre la guerre au Vietnam. Quelques semaines après les évènements à la Sorbonne, le Hornsey College of Art a été occupé pendant 6 semaines (fin mai - juin) et la London School of Economics est devenue une importante base pour la gauche radicale, notamment pour l'organisation des grandes manifestations de la Vietnam Solidarity Campaign. Il y a eu de vifs débats entre des étudiants de différentes tendances politiques (un grand nombre de mes camarades de cette année sont encore très actifs). Mon premier contact avec la LSE a été à la fin de l'année scolaire 1966-67. Je me souviens d'avoir diffusé des tracts écrits par les étudiants qui occupaient le hall de la fac alors que j'étais venu seulement pour un entretien en vue d'y continuer més études l'année suivante.
La petite gauche radicale anglaise était en ébullition à partir du début des années 1960.
Les Jeunesses socialistes étaient effectivement dominées par trois tendances trotskistes et allaient bientot etre dissoutes. Une des tendances - la plus sectaire, celle de Gerry Healy - tentèrent pendant quelques années à animer une association de jeunes sous le meme nom. Je n'ai jamais été tenté par les Healyites, dont le sectarisme et l'agressivité n'inspiraient pas confiance. Le triste dénouement de cette tendance allait me donner raison.
Les Grantites (membres de la tendance Militant dirigée par Ted Grant - encore un trostkiste sud-africain blanc) étaient plus sympathiques, et à Cambridge on faisait même des matchs de baby-foot contre eux, mais leurs discours stéréotypés étaient ennuyeux. Leur version préférée à l'époque consistait à dénoncer la mainmise des "400 monopoles' et à appeler à leur nationalisation. Nous n'avions rien contre leur nationalisation, mais en tant que partisans de la théorie du capitalisme d'Etat, cela ne nous semblait pas si radical que cela (en URSS toute l'économie était nationalisée). Un jour, en train de somnoler pendant un de ces discours, je me suis réveillé quand j'ai entendu l'orateur appeler à la nationalisation des "200 monopoles". Il paraît que la concentration du capital s'était avancée tout d'un coup, et la ligne avait changé.
Le PC britannique était encore la force la plus nombreuse et la mieux implantée à la gauche du Parti travailliste, mais il avait été ébranlé par la révolution hongroise de 1956, dont il ne faut pas sous-estimer l'importance en cette année de commémoration de l'année 1968. Mais il faut dire qu'avant d'avoir été exposé aux idées de Tony Cliff sur la nature capitaliste d'Etat de l'URSS j'avais encore l'idée que le pouvoir soviétique était quand meme le légitime successeur des bolchéviques. Mais j'étais plutôt sympathisant du Labour Party, dont l'aile gauche était très proche du PC. C'était de toute façon essentiellement par opposition au racisme qui se développait, avec l'arrivée de nouveaux immigrés noirs et de l'Asie du Sud, que j'ai commencé à prendre conscience politiquement. Dans ma famille, je n'avais jamais entendu parlé de Lénine ou de Trotski, plutot de Churchill, du général Montgomery et de la famille royale.
Le PC était essentiellement le parti d'une fraction de la bureaucratie syndicale, mais il existait une couche importante de militants de base, membres du PC ou du Labour Party ou non-encartés, souvent élus 'shop stewards' (délégués d'atelier) et prêts à agir indépendamment de cette bureaucratie.
Une de mes premières actions militantes en cette année scolaire 1967-68 était de participer avec d'autres étudiants à un piquet de grève très matinal et assez violent (de la part de la police, évidemment) des ouvriers du chantier du nouveau centre résidentiel et d'affaires du Barbican près de la City.
Un jour j'y suis allé monté à l'arrière de la moto d'un camarade étudiant originaire de l'Irlande du Nord. En revenant par le métro, j'ai acheté un petit journal à quelqu'un qui devait être un des dirigeants de la minuscule section anglaise de la IVème Internationale (c'était la quatrième et la plus petite des tendances trotskistes). Le journal s'appelait je crois The Week. Mais j'étais beaucoup plus convaincu et impressionné par les International Socialists et particulièrement par le théoricien de la tendance, Tony Cliff (1917-2000). Celui-ci passait beaucoup de temps chez les étudiants de la LSE mais nous exhortait continuellement à soutenir la lutte des travailleurs, seuls capables de changer la société. J'ai passé également quelques heures dans sa maison de Hackney avec lui et parfois sa femme extraordinaire Chanie - une trotskiste sud-africaine juive qui est toujours vivante et active en 2008. Tout le monde adorait Chanie, mais il ne fallait pas accepter de monter dans sa voiture à moins d'avoir des nerfs d'acier.
Plus tard il y a eu le mouvement de solidarité avec la grève très importante d'une équipe d'ouvrières à l'usine Ford de Dagenham qui revendiquaient l'égalité des salaires avec les hommes. J'ai assisté à une de leurs réunions. Mon camarade Sabby Sagall a même préparé le thé pendant que les grèvistes discutaient.
Des membres du Syndicat des Electriciens (ETU) étaient opposés à leur propre direction (alors violemment anti-communiste). Nous avons photocopié et agrafé à la LSE des centaines d'exemplaires d'une brochure écrite par un camarade électricien, qui ne pouvait pas militer ouvertement par peur d'exclusion du syndicat, que nous avons ensuite très bien vendue aux militants venus manifester à Hyde Park.
En septembre 1968, nous avons reçu le premier numéro du journal Socialist Worker, imprimé sur un papier carton un peu bizarre, avec en dernière page un article sur les évènements en France écrit par Laurie Flynn (un copain de la LSE). Une de nos activités avaient été de vendre le journal de IS appelé alors Labour Worker aux portes des réunions mensuelles des sections des syndicats (surtout celui des métallos, l'Amalagamated Engineering Union), mais le nom était devenu chez les meilleurs militants ouvriers un véritable repoussoir - d'où son changement. Nous n'avions pas encore l'habitude de faire des ventes à la criée dans la rue - une activité dont j'allais devenir un véritable champion par la suite.
L'année 1968 fut également l'année du fameux discours raciste du député conservateur réactionnaire Enoch Powell, qui était en plus un ancien élève de mon lycée. C'était en avril. Certains dockers londiniens ont fait grève pour le soutenir. On était hanté par le spectre d'un mouvement fasciste de masse avec une base ouvrière. Un militant docker membre des International Socialists, Terry Barrett, est venu à la LSE animer une réunion ; c'était un orateur très puissant - une grande gueule. Les International Socialists ont décidé alors de lancer un appel à l'unité de la gauche radicale (et oui, déjà!) sous forme non pas d'un long texte de synthèse mais d'un simple tract contenant quelques points simples à comprendre comme l'opposition aux controles de l'immigration et aux limitations des salaires. J'ai participé à sa diffusion ; malheureusement, à part l'adhésion d'un petit groupe sectaire, il n'a pas eu l'effet escompté. La section britannique de la IVème Internationale, notamment, est resté à l'écart. Il faut dire qu'elle était plutot branchée sur le rôle d'avant-garde des étudiants (les bases rouges dans les facs) et les révolutions anti-coloniales ("Ho, Ho, Ho Chi Minh").
Une autre manifestation était celle du 1er mai. Cette fête n'était pas fériée et il n'y avait plus de tradition de grève ou de manifs ce jour-là. L'idée a été relancée notamment par un syndicaliste de la presse qui avait démisionné du PC quelques années auparavant (John Lawrence) et a donné lieu à une petite manifestation près de la Tour de Londres. J'y ai participé dans le cortège des International Socialists.
Enfin, une autre grande manifestation a eu lieu à Londres en avril en solidarité avec le dirigeant étudiant allemand Rudi Dutschke qui avait été victime d'une tentative d'assassinat.
Note : Cette chronologie intéressante des manifestations en Allemagne entre 1964 et 1969 suggère que la manifesation à Londres a eu lieu entre le 14 et le 16 avril. Mais elle se trompe en disant que Dutschke a été "assassiné". En fait il a été gravement blessé mais s'est rétabli suffisamment pour poursuivre sa carrière académique à Londres et au Danemark. Il est mort en 1979 des séquelles de l'attentat.
L'année 1968 n'avait pas encore pris fin que le mouvement pour les droits civiques des Catholiques en Irlande du Nord (inspiré en grande partie par l'exemple de la lutte des Noirs américains) éclata et les chars russes écrasèrent le mouvement réformiste tchèque. A Birmingham, j'ai participé à une manifestation contre l'occupation russe où les International Socialists ont tenté de faire entendre une voix originale : "ni Washington , ni Moscou". Des années plus tard, lors du coup d'Etat de Jaruszelski en Polgne en 1981, je suis allé directement aux Invalides manifester près de l'ambassade polonaise à Paris. Nous, à la différence d'autres "soixante-huitards" comme Kouchner ou Glucksmann n'avons strictement rien à nous reprocher de ce coté-là. Notre combat était contre tous les impérialismes et contre le capitalisme sous toutes ses formes, à l'Est comme à l'Ouest. C'est sans doute pour cela que nous n'avons pas trahi nos idéaux comme eux. A l'époque, cela nous faisait toujours sourire quand on nous disait de "retourner à Moscou".
Le reste, ce serait trop long à raconter ...
Un excellent article en français sur La contestation dans les universités anglaises dans les années 1966-68 ...
Sur Wikipedia en anglais, cet article donne une liste impressionnante des mouvements contestataires en 1968 dans le monde
Il faut quand meme que je parle un peu de mon mai '68. Ou plutôt de toute cette période turbulente dont les mois de mai-juin français ne sont finalement qu'un moment.
En mai '68 (Louis Armstrong est au n° 1 avec What a Wonderful World) j'étais étudiant en Angleterre et déjà très politisé. Nous avons suivi avec beaucoup d'intéret ce qui se passait en France. J'ai le souvenir d'une réunion de cellule qui a eu dans ma propre chambre dans le grand appartement de Finchley Road à Londres que je co-louais avec cinq autres camarades. Je partageais la chambre avec un camarade qui fumait des Gaulloises au lit et allait devenir un spécialiste reconnu de la musique pop (Dylan, Buddy Holly notamment). On écoutait A Love Supreme de John Coltrane (sorti en 1964). La réunion a été animée par (je pense) un militant anarcho-syndicaliste anglais qui a été témoin des évènements. Mais nous n'avions pas attendu l'occupation de la Sorbonne pour militer.
Il y eut le mouvement contre la guerre au Vietnam. A Cambridge où j'ai fait mes études nous avons organisé quelques actions. Je me souviens d'une manifestation contre la projection du film Les bérets verts avec John Wayne dans un cinéma de la ville ; des étudiants de gauche y ont participé avec entre autres des pacifistes appartenant à l'église des Quakers, historiquement très présente dans cette région d'Angleterre.
Note : Le film étant sorti seulement en juin 1968 il s'agit d'une erreur de ma part. Ma mémoire n'est pas infaillible !
Une autre fois nous avons lancé l'idée d'une manif contre l'invitation faite par une association d'étudiants (Officers Training Corps) à un responsable d'une base militaire américaine (il y en a beaucoup dans l'Est de l'Angleterre). Etant allité à l'infirmerie j'ai preté ma chambre pour une réunion d'organisation. A sa grande surprise, le malade a reçu la visite de deux personnes (si mes souvenirs sont bons, un haut gradé de la police et un militaire) visiblement très inquiets et soucieux de connaître nos intentions. L'invitation a été annulée et nous avons gagné sans rien faire.
La première grande manifestation nationale eut lieu à Londres le 22 octobre 1967 (les Bee Gees sont au n° 1 avec Massachusetts) et donna lieu à des confrontations spectaculaires avec la police montée à Grosvenor Square devant l'ambassade américain (j'y étais et j'ai vu les chevaux de près). La Vietnam Solidarity Campaign a organisé deux autres grands rassemblements, en mars et octobre 1968. Mais nous avions d'autres raisons à manifester et à militer.
Quand on est militant révolutionnaire on est d'abord anti-raciste. Le mouvement pour les droits civiques aux Etats-Unis a eu une énorme influence. Les premières images des actualités dont je me souviens (à part le couronnement de la reine en 1953) sont celles des flics blancs de l'Alabama ou du Mississippi en train de tabasser des militants noirs. Les idées de Malcolm X étaient dans l'air et allaient bientôt pénétrer une partie de la jeunesse afro-caribéenne. Quelques années plus tard à Birmingham, j'ai assisté à un débat passionné entre militants noirs pour savoir si j'avais le droit - avec d'autres militants blancs - de rester dans la salle. Je ne leur en voulais pas.
A la meme époque (nous sommes au début des années 1970) nous avons été invités à une soirée chez un dirigeant de l'Association des Travailleurs indiens (Indian Workers' Association), Avtar Singh Jouhl. C'était un militant totalement dévoué à la cause et un allié très important dans la lutte contre l'extrême droite, qui avait bien sûr été formé politiquement en Inde. Tout trotskistes que nous étions, nous avons bien profité de la cuisine indienne, assises par terre, entourés de bustes et de portraits de Staline. Telles sont les contradictions du Front unique.
Les années 1950 vit en Grande-Bretagne un grand mouvement contre la menace nucléaire autour d'une revendication claire et nette : le désarmement nucléaire unilatéral (c'est-à-dire sans conditions) de la Grande-Bretagne. Je n'y ai pas particpé, mais il existait une section de la Campagne pour le désarmement nucléaire (CND) à Cambridge avec laquelle j'étais en contact.
En 1964, Harold Wilson (le Kennedy anglais, disait-on) mit fin aux "treize années perdues" de gouvernements conservateurs. Nous y croyions beaucoup, mais la désillusion vint vite. Wilson s'alignera de façon un peu honteuse sur la politique américaine au Vietnam, s'attaquera aux travailleurs de la marine marchande en grève ("un complot communiste"), tentera de limiter les salaires et de réduire le role des militants de base dans les syndicats et se révèlera impuissant face au coup d'Etat de la minorité de colons blancs en Rhodésie du Sud (aujourd'hui le Zimbabwe). J'ai fait campagne pour le Labour en 1964 à Birmingham et de nouveau en 1966 dans les fins fonds de la campagne du Cambridgeshire, mais ce sera la dernière fois. L'extrême gauche - essentiellement les International Socialists auxquels j'adhère - commençait à grandir et à gagner en confiance.
La radicalisation dans les universités commença bien avant mai '68. Même à Cambridge :
- Nous avons manifesté contre l'apartheid en Afrique du Sud et le régime d'Ian Smith en Rhodésie. Lors d'une manif très respectable, avec des représentants des églises, des étudiants sud-africains blancs membres d'un club de rugby ont fait une contre-manifestation et lancé des petits pains rassis (!).
J'ai conservé pendant des années une aversion particulière non seulement pour le rugby mais aussi pour l'accent sud-africain (que certains comparent à l'accent pas très joli de ma ville natale de Birmingham), malgré le fait que plusieurs de mes camarades, dont un de mes co-locataires, étaient des exilés blancs sud-africains. Ce dernier avait été fermier en brousse en Afrique du Sud, et trotskiste. Il nous a raconté comment son voisin le plus proche, à quelques kilomètres de là, était également trotskiste, mais appartenait à une autre tendance. (Cela semble etre trop beau pour etre vrai).
En 1967-68, un cortège organisé très rapidement est parti de la LSE pour aller au siège du gouvernement rhodésien à quelques centaines de mètres de là mais nous ne sommes jamais arrivés, la police étant plus rapide que nous. En voulant arracher un camarade des mains de la police j'ai été embarqué moi aussi. J'ai passé quelques heures au poste et payé une amende de deux livres (!). Ce qu'il faut savoir également est que la radicalisation des étudiants de la LSE devait beaucoup à la nomination au poste de directeur de cet établissement prestigieux d'un rhodésien du sud proche du régime rebelle et raciste d'Ian Smith. Un de nos camarades étudiants, un rhodésien d'origine indienne appelé Basker Vashee, a été le principal animateur de l'opposition à cette nomination.
- L'association des étudiants travaillistes de Cambridge (Labour Club) a scissionné sous les effets de la politique anti-ouvrière et pro-américaine du gouvernement de Harold Wilson. J'étais déjà proche de l'extrême gauche et en parallèle à nos activités de recrutement à l'association nous lisions des journaux révolutionnaires (Labour Worker, Militant ...) et assistions à des réunions avec des orateurs trotskistes (Nigel Harris, Tony Cliff ...). (Voir ici un article de Nigel Harris datant de l'automne 1968 intitulé Race and Nation)
Au début de l'année scolaire 1965-66 ou 1966-67 nous avons officiellement organisé une réunion de recrutement au Labour avec (je pense) le ministre Dennis Healey, un travailliste de droite très "droit dans ses bottes", comme invité. Après avoir assuré la sécurité du ministre et aidé à canalisé la foule, nombreuse, nous avons enlevé nos brassards et nous sommes entrés dans la salle pour manifester bruyamment pendant son discours. Pas très "fair-play", il est vrai. Une autre fois, le ministre des affaires étrangères, Michael Stewart, très pro-américain, a été la victime de nos agissements. Pris dans une bousculade et coincé dans un couloir étroit, il s'en est sorti indemne de justesse. Le Labour Club sera dissous par l'appareil travailliste, ce qui peut se comprendre, d'ailleurs.
- Nous avons commencé à contester la gestion encore très paternaliste de l'université par un professorat très traditionnaliste (il y avait encore une ségrégation entre les étudiants et les étudiantEs). J'ai aidé à créer une association éphémère à King's College qui s'appelait King's Left, ce qui m'a valu quelques manifestations d'hostilité de la part de certains étudiants abrutis issus des collèges privés comme Eton. Le directeur (Provost) de King's a par contre bien voulu venir dialoguer avec nous, dans ma chambre.
Des occupations (sit-ins) accompagnées de cours et de de débats alternatifs (teach-ins) ont eu lieu à partir de 1967, suivant le modèle des manifestations organisées sur les campus américains contre la guerre au Vietnam. Quelques semaines après les évènements à la Sorbonne, le Hornsey College of Art a été occupé pendant 6 semaines (fin mai - juin) et la London School of Economics est devenue une importante base pour la gauche radicale, notamment pour l'organisation des grandes manifestations de la Vietnam Solidarity Campaign. Il y a eu de vifs débats entre des étudiants de différentes tendances politiques (un grand nombre de mes camarades de cette année sont encore très actifs). Mon premier contact avec la LSE a été à la fin de l'année scolaire 1966-67. Je me souviens d'avoir diffusé des tracts écrits par les étudiants qui occupaient le hall de la fac alors que j'étais venu seulement pour un entretien en vue d'y continuer més études l'année suivante.
La petite gauche radicale anglaise était en ébullition à partir du début des années 1960.
Les Jeunesses socialistes étaient effectivement dominées par trois tendances trotskistes et allaient bientot etre dissoutes. Une des tendances - la plus sectaire, celle de Gerry Healy - tentèrent pendant quelques années à animer une association de jeunes sous le meme nom. Je n'ai jamais été tenté par les Healyites, dont le sectarisme et l'agressivité n'inspiraient pas confiance. Le triste dénouement de cette tendance allait me donner raison.
Les Grantites (membres de la tendance Militant dirigée par Ted Grant - encore un trostkiste sud-africain blanc) étaient plus sympathiques, et à Cambridge on faisait même des matchs de baby-foot contre eux, mais leurs discours stéréotypés étaient ennuyeux. Leur version préférée à l'époque consistait à dénoncer la mainmise des "400 monopoles' et à appeler à leur nationalisation. Nous n'avions rien contre leur nationalisation, mais en tant que partisans de la théorie du capitalisme d'Etat, cela ne nous semblait pas si radical que cela (en URSS toute l'économie était nationalisée). Un jour, en train de somnoler pendant un de ces discours, je me suis réveillé quand j'ai entendu l'orateur appeler à la nationalisation des "200 monopoles". Il paraît que la concentration du capital s'était avancée tout d'un coup, et la ligne avait changé.
Le PC britannique était encore la force la plus nombreuse et la mieux implantée à la gauche du Parti travailliste, mais il avait été ébranlé par la révolution hongroise de 1956, dont il ne faut pas sous-estimer l'importance en cette année de commémoration de l'année 1968. Mais il faut dire qu'avant d'avoir été exposé aux idées de Tony Cliff sur la nature capitaliste d'Etat de l'URSS j'avais encore l'idée que le pouvoir soviétique était quand meme le légitime successeur des bolchéviques. Mais j'étais plutôt sympathisant du Labour Party, dont l'aile gauche était très proche du PC. C'était de toute façon essentiellement par opposition au racisme qui se développait, avec l'arrivée de nouveaux immigrés noirs et de l'Asie du Sud, que j'ai commencé à prendre conscience politiquement. Dans ma famille, je n'avais jamais entendu parlé de Lénine ou de Trotski, plutot de Churchill, du général Montgomery et de la famille royale.
Le PC était essentiellement le parti d'une fraction de la bureaucratie syndicale, mais il existait une couche importante de militants de base, membres du PC ou du Labour Party ou non-encartés, souvent élus 'shop stewards' (délégués d'atelier) et prêts à agir indépendamment de cette bureaucratie.
Une de mes premières actions militantes en cette année scolaire 1967-68 était de participer avec d'autres étudiants à un piquet de grève très matinal et assez violent (de la part de la police, évidemment) des ouvriers du chantier du nouveau centre résidentiel et d'affaires du Barbican près de la City.
Un jour j'y suis allé monté à l'arrière de la moto d'un camarade étudiant originaire de l'Irlande du Nord. En revenant par le métro, j'ai acheté un petit journal à quelqu'un qui devait être un des dirigeants de la minuscule section anglaise de la IVème Internationale (c'était la quatrième et la plus petite des tendances trotskistes). Le journal s'appelait je crois The Week. Mais j'étais beaucoup plus convaincu et impressionné par les International Socialists et particulièrement par le théoricien de la tendance, Tony Cliff (1917-2000). Celui-ci passait beaucoup de temps chez les étudiants de la LSE mais nous exhortait continuellement à soutenir la lutte des travailleurs, seuls capables de changer la société. J'ai passé également quelques heures dans sa maison de Hackney avec lui et parfois sa femme extraordinaire Chanie - une trotskiste sud-africaine juive qui est toujours vivante et active en 2008. Tout le monde adorait Chanie, mais il ne fallait pas accepter de monter dans sa voiture à moins d'avoir des nerfs d'acier.
Plus tard il y a eu le mouvement de solidarité avec la grève très importante d'une équipe d'ouvrières à l'usine Ford de Dagenham qui revendiquaient l'égalité des salaires avec les hommes. J'ai assisté à une de leurs réunions. Mon camarade Sabby Sagall a même préparé le thé pendant que les grèvistes discutaient.
Des membres du Syndicat des Electriciens (ETU) étaient opposés à leur propre direction (alors violemment anti-communiste). Nous avons photocopié et agrafé à la LSE des centaines d'exemplaires d'une brochure écrite par un camarade électricien, qui ne pouvait pas militer ouvertement par peur d'exclusion du syndicat, que nous avons ensuite très bien vendue aux militants venus manifester à Hyde Park.
En septembre 1968, nous avons reçu le premier numéro du journal Socialist Worker, imprimé sur un papier carton un peu bizarre, avec en dernière page un article sur les évènements en France écrit par Laurie Flynn (un copain de la LSE). Une de nos activités avaient été de vendre le journal de IS appelé alors Labour Worker aux portes des réunions mensuelles des sections des syndicats (surtout celui des métallos, l'Amalagamated Engineering Union), mais le nom était devenu chez les meilleurs militants ouvriers un véritable repoussoir - d'où son changement. Nous n'avions pas encore l'habitude de faire des ventes à la criée dans la rue - une activité dont j'allais devenir un véritable champion par la suite.
L'année 1968 fut également l'année du fameux discours raciste du député conservateur réactionnaire Enoch Powell, qui était en plus un ancien élève de mon lycée. C'était en avril. Certains dockers londiniens ont fait grève pour le soutenir. On était hanté par le spectre d'un mouvement fasciste de masse avec une base ouvrière. Un militant docker membre des International Socialists, Terry Barrett, est venu à la LSE animer une réunion ; c'était un orateur très puissant - une grande gueule. Les International Socialists ont décidé alors de lancer un appel à l'unité de la gauche radicale (et oui, déjà!) sous forme non pas d'un long texte de synthèse mais d'un simple tract contenant quelques points simples à comprendre comme l'opposition aux controles de l'immigration et aux limitations des salaires. J'ai participé à sa diffusion ; malheureusement, à part l'adhésion d'un petit groupe sectaire, il n'a pas eu l'effet escompté. La section britannique de la IVème Internationale, notamment, est resté à l'écart. Il faut dire qu'elle était plutot branchée sur le rôle d'avant-garde des étudiants (les bases rouges dans les facs) et les révolutions anti-coloniales ("Ho, Ho, Ho Chi Minh").
Une autre manifestation était celle du 1er mai. Cette fête n'était pas fériée et il n'y avait plus de tradition de grève ou de manifs ce jour-là. L'idée a été relancée notamment par un syndicaliste de la presse qui avait démisionné du PC quelques années auparavant (John Lawrence) et a donné lieu à une petite manifestation près de la Tour de Londres. J'y ai participé dans le cortège des International Socialists.
Enfin, une autre grande manifestation a eu lieu à Londres en avril en solidarité avec le dirigeant étudiant allemand Rudi Dutschke qui avait été victime d'une tentative d'assassinat.
Note : Cette chronologie intéressante des manifestations en Allemagne entre 1964 et 1969 suggère que la manifesation à Londres a eu lieu entre le 14 et le 16 avril. Mais elle se trompe en disant que Dutschke a été "assassiné". En fait il a été gravement blessé mais s'est rétabli suffisamment pour poursuivre sa carrière académique à Londres et au Danemark. Il est mort en 1979 des séquelles de l'attentat.
L'année 1968 n'avait pas encore pris fin que le mouvement pour les droits civiques des Catholiques en Irlande du Nord (inspiré en grande partie par l'exemple de la lutte des Noirs américains) éclata et les chars russes écrasèrent le mouvement réformiste tchèque. A Birmingham, j'ai participé à une manifestation contre l'occupation russe où les International Socialists ont tenté de faire entendre une voix originale : "ni Washington , ni Moscou". Des années plus tard, lors du coup d'Etat de Jaruszelski en Polgne en 1981, je suis allé directement aux Invalides manifester près de l'ambassade polonaise à Paris. Nous, à la différence d'autres "soixante-huitards" comme Kouchner ou Glucksmann n'avons strictement rien à nous reprocher de ce coté-là. Notre combat était contre tous les impérialismes et contre le capitalisme sous toutes ses formes, à l'Est comme à l'Ouest. C'est sans doute pour cela que nous n'avons pas trahi nos idéaux comme eux. A l'époque, cela nous faisait toujours sourire quand on nous disait de "retourner à Moscou".
Le reste, ce serait trop long à raconter ...
Un excellent article en français sur La contestation dans les universités anglaises dans les années 1966-68 ...
Sur Wikipedia en anglais, cet article donne une liste impressionnante des mouvements contestataires en 1968 dans le monde
Libellés : 1968, Royaume-Uni
04 mai 2008
Angleterre : défaite cuisante de Gordon Brown, recul de la gauche radicale
Boris Johnson, le nouveau maire de droite de Londres. La preuve que le New Labour peut perdre contre n'importe qui.
Sale journée dimanche pour la gauche anglaise et galloise (on ne votait pas en Ecosse). Ce n'est pas tant la claque prise par le New Labour de Gordon Brown, largement méritée, qui inquiète, mais le recul de la gauche radicale et les gains - modestes mais réels - de l'extreme droite fasciste qui gagne notamment un siège à l'Assemblée de Londres.
Le véritable vainqueur de ces élections locales est le Parti conservateur qui, grace à la politique droitière du New Labour, a pu se positionner habilement pour attirer en plus de son électorat réactionnaire traditionnel une partie de l'électorat populaire travailliste. Des Tories à la tete de conseils municipaux dans le nord-est de l'Angleterre et au Pays de Galles, où il y a pas longtemps ils étaient une espèce en voie de disparition, c'est tout un symbole.
La gauche radicale, encore plus divisée depuis la scission de RESPECT l'année dernière, incapable de présenter une alternative crédible au niveau national, recule dans beaucoup de villes, et notamment à Londres. Un seul conseiller est élu. Quelques bons résultats dans des circonscriptions locales isolées - à Birmingham, à Preston, à Manchester, à Sheffield, à Bolton, à Cambridge - viennent cependant nuancer ce tableau noir. Nous y reviendrons plus dans le détail dès que possible.
Heureusement, il y a des signes importants d'une nouvelle combativité des salariés, comme témoigne la magnifique grève du 24 avril dans le secteur public. Avec un gouvernement 'travailliste' affaibli et le risque important d'un gouvernement conservateur dans un avenir proche, c'est le moment de mettre l'accent sur les luttes. Mais l'absence d'alternative politique est un vrai problème qui ne peut etre contourné.
Move to the right punishes Labour for 10 wasted years, par RESPECT - The Unity Coalition
Gordon Brown to blame for New Labour's election rout, dans Socialist Worker
London meltdown, par Richard Seymour
Elections analysis from left List
Dans cet article (en anglais) Anindya Bhattacharrya appelle à une réaction unie de la gauche à la menace fasciste. A Londres, le British National Party a recueilli 5,3% des voix, contre 4,7% en 2004 - un gain modeste qui permet au BNP cependant de franchir la barre des 5% et d'obtenir un siège à l'Assemblée de Londres. Dans le reste du pays, il gagne une dizaine de sièges de conseillers et totalise dorénavant 9 conseillers dans la ville moyenne de Stoke-on-Trent. Des pertes de sièges dans d'autres villes cependant démontrent que cette montée n'est pas irrésistible. La photo montre des participajnts au festival anti-nazi récent à Victoria Park dans un quartier populaire de l'Est de Londres.
Libellés : Respect, Royaume-Uni