08 avril 2007

 
José Bové : "La loi de mars 2004 (sur les signes religieux ostensibles à l'école) est une loi discriminatoire et doit être abrogée."

Dans cet entretien avec le site Oumma.com, José Bové démontre son opposition sans faille à toutes les formes de discrimination. La partie consacrée à la question de l'islam, en particulier, est remarquable (voir l'extrait ci-dessous). Il y a peu d'hommes ou de femmes politiques français(es) qui ont une position aussi claire. A comparer avec la langue de bois employée par O. Besancenot dans sa réponse à la même question.

/.../ L’islamophobie est un phénomène dont la gravité est attestée par des études de la CNCDH (Commission nationale consultative des droits de l’Homme), ainsi que par diverses organisations de défense des droits de l’Homme. Quelles dispositions comptez-vous prendre pour lutter contre l’islamophobie ?

JB - La stigmatisation des Musulmans et des populations de culture islamique est devenue un des principaux véhicules de l’idéologie et des pratiques racistes en France et dans le monde. C’est un phénomène extrêmement dangereux qui met à l’index une partie importante de l’humanité et de la population française. Ce discours favorise en plus la crispation et le repli identitaire de chacun des "camps" qu’il définit, compromettant de plus en plus les possibilités de vie commune pacifique. Il doit être combattu vigoureusement, comme doivent être combattues toutes les formes de racismes, de discrimination et d’incitation à la haine sur la base de l’origine ethnique ou culturelle, des convictions religieuses ou philosophiques, des choix et orientations sexuelles ou existentielles, du sexe ou des caractères physiques.
Il est par ailleurs impératif de défendre la séparation de l’Etat et de la religion, d’imposer le respect des droits et libertés des individus quelle que soit leur origine ou leur orientation philosophique ou religieuse, de garantir la liberté de croire ou de ne pas croire ainsi que la possibilité de pratiquer ses convictions dans des conditions dignes, d’égalité entre les cultes et de respect des droits de chacun-e. Parmi les droits les plus fondamentaux nous mettons aussi les droits à la libre expression, à la liberté de la presse, à la liberté de critiquer y compris les croyances et religions.
C’est pour cela que je tiens à ce qu’un sérieux effort soit déployé pour distinguer ceux-ci de l’incitation à la haine, de la stigmatisation et de la mise à l’index de parties de la population. Je peux dire d’ores et déjà que les caricatures des années trente présentant les juifs au nez crochus et aux airs sournois ne relèvent pas de la critique inoffensive, elles ont contribué à faire le terreau d’un racisme aux conséquences fatales. De la même manière, représenter les musulmans systématiquement comme des terroristes, des violents et des abrutis ne relève pas de la simple liberté de la presse.

La loi de mars 2004 qui bannit les signes religieux ostensibles de l’école a eu pour conséquence la déscolarisation de dizaines de jeunes filles et leur éviction du monde du travail. Quelles mesures pourrez-vous prendre pour faciliter leur réintégration dans la société ?

JB - J’ai toujours été clairement contre cette loi. Il est évident que c’est une loi qui est principalement préjudiciables aux musulmanes, en plus d’un certains nombre de Sikhs. C’est une loi discriminatoire qui doit être abrogée. Je suis, plus largement, pour une législation qui se donne les moyens de défendre effectivement le libre choix des femmes, entre autre de porter le foulard ou de ne pas le porter. Cela signifie de se donner de réels moyens d’interdire toute discrimination et tout préjudice lié au port du foulard, de se donner également les moyens d"interdire toute contrainte faite aux femmes, notamment de le porter. Les filles déscolarisées doivent bien entendu avoir à nouveau accès à l’école publique.
La légitimité du CFCM, notamment le mode d’élection de ses responsables, est aujourd’hui contestée par de nombreux citoyens français de culture musulmane. Quelle est votre opinion à ce sujet ?
JB - Les Musulman-e-s, comme les adeptes des autres religions, doivent avoir la possibilité de s’organiser afin d’organiser l’exercice de leur culte dans des conditions décentes, libres et en compatibilité avec les lois de la République. Ceci doit pouvoir se faire sans immixtion de l’Etat. Le CFCM est le fruit de négociations entre le ministère de l’intérieur et des interlocuteurs musulmans qu’il a lui-même désigné ou reconnu.
Les Musulman-e-s, comme les fidèles d’autres croyances doivent pouvoir s’organiser librement et hors d’une tutelle de l’Etat contraire au principe de laïcité. Pour que les institutions qu’ils se donnent soient reconnues comme interlocuteur par l’Etat pour l’organisation pratique du culte, il est préférable qu’elles soient réellement représentatives et transparentes. Je ne suis pas sûr que le CFCM, œuvre de Nicolas Sarkozy, corresponde à ces qualités.

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