08 mars 2009

 

Elie Domota : "Restons mobilisés"

Nous l’avons déjà dit : nous marchons, encore et encore ; mais c’est pour que la vie change.

Et aujourd’hui nous étions très heureux de recevoir des camarades des associations de personnes handicapées [en tête de la manifestation].

Parce qu’il est vrai que dans tout ce que nous avons dénoncé, nous nous adressions à des personnes en souffrance mais valides ; mais les handicapés vivent des situations 10 fois, 100 fois, mille fois plus difficiles que la notre. Et c’est pourquoi je vous demande de les applaudir chaleureusement !

La Guadeloupe, c’est tout le monde et c’est aussi beaucoup de solidarité. Et justement, pour que nous puissions défendre leurs droits, il nous faut être solidaires entre nous, certes ; mais également avec eux. C’est important.

Ce que nous tenions également à dire aujourd’hui, c’est que nous entendons à nouveau plein de discours... Mais aujourd’hui, la meilleure réponse que nous pouvions leur adresser c’était de marcher, comme nous l’avons fait, à plus de 30000 mille dans les rues de Pointe à Pitre...

Afin de répondre à M. Willy ANGELE du MEDEF Guadeloupe ; et lui dire :

Que, premièrement, il n’a pas le droit de faire de proposition d’accord salarial ; puisque les statuts du MEDEF l’interdisent. Or nous le voyons toujours à la télé en train de proposer un accord salarial.

Que, deuxièmement, c’est une escroquerie de leur part que de prétendre donner 240 euro. Ils mentent ! L’argent du Conseil Régional et du Conseil Général a été mis à contribution dans l’accord Jacques BINO. Et ces deux institutions n’ont plus d’argent, puisqu’il a été donné aux ménages.

Cela veut dire que le MEDEF sera obligé de demander aux patrons de mettre de l’argent encore ; or ils ne veulent pas le faire !

La troisième chose qu’il leur appartient de dire est que l’accord proposé par le MEDEF est une supercherie ; puisqu’il n’excède pas trois années. A supposer qu’ils versent l’argent aux travailleurs, ils arrêteront de le leur verser au bout de ces trois années.

Voilà ce que M. ANGELE doit également préciser ! Donc aujourd’hui, il ne leur reste qu’un choix possible : appliquer l’accord BINO !

Et d’ores et déjà, il y a beaucoup d’entreprises adhérentes au MEDEF qui s’y sont décidées :

La Fédération du BTP , toutes les entreprises membres de cette Fédération, ont signé !

Hier soir, c’est M. Le METAYER, propriétaire des LEADER PRICE, qui l’a fait !
Hier soir encore, c’est l’hôtel NOVOTEL qui a signé !

Et aujourd’hui, il y en a beaucoup d’autres qui sont prêtes à le faire ! Mais sans que la bande à ANGELE le sache. Elles demandent donc à nous rencontrer en secret !

Alors, camarades, ce que nous vous demandons c’est de toujours rester dans la solidarité et mobilisés. Notamment pour les camarades de carrefour, de Match, de Cora, de champion, de Bannette (propriété de M. AUBERY)...

Puisque nous le voyons bien : ce sont toujours les mêmes, ceux qui font des profits, ceux qui ont les poches pleines depuis 400 ans... qui ne veulent pas lâcher un centime !

C’est pourquoi nous disons à tous les travailleurs de ces entreprises de se mettre en grève, de rester mobilisés !

Et vous tous qui êtes présents, dites à vos amis et parents de boycotter les magasins de ceux (Ces messieurs ont pour nom AUBERY, HAYOT, DESPOINTES...) qui refusent d’accorder les 200 euro !

Et à ceux qui savent qu’ils sont atteints de la maladie consistant à pousser des chariots dans les centres commerciaux et hyper marchés, nous disons : cherchez une autre occupation ! N’allez plus dans leurs magasins. Même pas pour acheter un bonbon à la menthe ! Et même si la chose que nous aimons le plus n’est disponible que dans là [dans leurs magasins], changeons de consommation, mais n’y allons pas !

Sommes nous d’accord ?! Sommes nous bien tous d’accord ?!

C’est la seule façon de leur faire comprendre que nous n’avons pas besoin d’eux ! Il nous faudra le leur dire très clairement ; car ils croient encore que travaillant dans leurs entreprises, nous aurions besoin d’eux. Ils ont bien plus besoin de nous, que nous d’eux ! Nous devons leur faire comprendre cela !

Donc, nous n’allons pas dans leurs magasins ! Camarades, nous devons prendre cet engagement. L’engagement de boycotter le produit de ces messieurs ! A compter du moment où ils ne nous donnent pas les 200 euro, cela veut dire qu’ils sont contre nous ! Et dès lors nous ne pouvons les porter, si eux ils nous traînent !

Nous n’achetons plus dans leurs magasins ! Tant qu’ils ne nous donnent pas les 200 euro, même s’ils sont ouverts, nous n’entrons pas dans leurs magasins !

Ansanm nou ka lité ! Ansanm nou ké gannyé !
Jou nou ké mété a jounou... Péké vwè jou !

Elie DOMOTA
Pointe à Pitre
Samedi 7 mars 2009


NOUVEAU : SUR MEDIAPART

09 Mars 2009 Par Maguy Day

Dans un entretien à Mediapart, Elie Domota, leader du collectif guadeloupéen de Liyannaj kont pwofitasyon (collectif contre l’exploitation outrancière, LKP), explique pourquoi, malgré l'accord salarial signé en Guadeloupe entre le LKP et une partie du patronat, la tension n'a pas baissé dans l'île. Outre l'ouverture d'une enquête judiciaire à son encontre pour incitation à la haine raciale, il dénonce l’intransigeance du Medef local, absent de la table des négociations, et de certains békés (descendants d’esclavagistes) qui, contrairement à de nombreuses PME, refusent toujours d’accorder une augmentation aux bas salaires.

Le secrétaire d’Etat à l’outre-mer, Yves Jégo vient de qualifier de «dérapage verbal inadmissible» vos propos contre les patrons békés alors que vous aviez déclaré à leur propos en créole: «Soit ils appliquent cet accord, soit ils quittent la Guadeloupe. (…) Nous ne laisserons pas les békés rétablir l'esclavage.» Que pensez-vous de l’ouverture, samedi 7 mars, par le parquet de Pointe-à-Pitre d’une enquête pour provocation à la haine raciale et tentative d'extorsion de signature à votre encontre?
S’ils m’envoient devant les juges, c’est toute la Guadeloupe qui ira au tribunal. Souvenez-vous qu’en 1967, il y a eu 100 manifestants tués en Guadeloupe. Et ce sont les Guadeloupéens qui se sont retrouvés derrière les barreaux et que l’on a accusés d’être subversifs. Nous sommes très sereins. De toute façon, cela fait partie de l’alliance justice-Etat-grand patronat. Nous y sommes habitués. Cela fait 400 ans que nous subissons le racisme, la répression et la discrimination, donc nous ne sommes pas étonnés. On leur dit simplement que cela ne passera plus. Si l’affaire est portée devant les tribunaux, le monde entier verra que les questions de race et de classe sont restées inchangées depuis la période de l’esclavage.

Frédéric Lefebvre, porte-parole de l'UMP, a déclaré vendredi 6 mars, qu'on voyait en Guadeloupe agir «des sortes de tontons macoutes du LKP», faisant ainsi allusion à la milice paramilitaire créée par l’ancien dictateur François Duvalier à Haïti dans les années 1960.
C’est un affront. Ils cherchent à salir et discréditer le LKP. Cela fait quatre semaines que Monsieur Lefebvre et ses amis, par l’intermédiaire du journal Le Figaro, nous accusent d’actes de violence, nous dénigrent, cherchent à décrédibiliser un mouvement social légitime et les Guadeloupéens qui manifestent depuis un mois et demi dans le calme. Les choses sont simples: les supermarchés Match, Champion, Cora, Carrefour, au service d’une certaine caste, refusent d’appliquer l’accord Jacques-Bino alors que les autres PME l’appliquent.

Ils veulent que la société guadeloupéenne reste inchangée. Dès lors que nous nous élevons contre des critères de race ou de caste, ils se sentent menacés. Une plainte contre M. Lefebvre et certains journalistes est à l’étude chez nos avocats. Quant à Monsieur Yves Jégo, il n’a pas réagi aux propos de Monsieur Lefebvre mais il a cru bon de partir dans une grande envolée lyrique à mon sujet.

Au lendemain de la signature de l’accord salarial, vous avez dit que tout n’était pas réglé. Que vouliez-vous dire?
Il y a pas mal de supermarchés, de chaînes hôtelières qui refusent de signer l’accord salarial. Elles s’opposent à l’accord de pérennité qui prévoit qu’après trois ans, elles prennent en charge la totalité des 200 euros d’augmentation pour les plus bas salaires. D’ici là et pour les entreprises de plus de 100 salariés, 100 euros seront à la charge de l’entreprise, 100 euros à la charge de l’Etat. Comme par hasard, ce sont des membres de la catégorie bien particulière que sont les békés [qui refusent].

Comment expliquez-vous que les petits artisans aient accepté de vendre pratiquement à prix coûtant, alors que les familles Hayot ou Huygues-Despointes, qui dégagent encore des marges commerciales, refusent. Et alors même que les aides actuelles et futures en leur faveur ne sont pas comptabilisées. C’est le monde à l’envers! Il faut que l’Etat intervienne et dise: «Les gars, arrêtez vos conneries.»

Quelle est la part de responsabilité de l’Etat français?
Les positions dominantes et de quasi-monopoles des familles békés sont depuis toujours tolérées par le gouvernement. Aujourd’hui, certains semblent le découvrir mais cela s’est fait avec l’autorisation de l'Etat. Alors que nous voulons être entendus, et que nous demandons que les richesses en Guadeloupe soient redistribuées de manière plus équitable, en particulier celles des grandes chaînes de distribution alimentaire, on nous demande de nous taire.

Au lendemain de l’assassinat du syndicaliste Jacques Bino, Nicolas Sarkozy proposait, «dès le calme revenu», la tenue d’«états généraux» dans chaque collectivité d’outre-mer, que pensez-vous de ce rendez-vous?
Il a du plomb dans l’aile. Puisque le vrai problème d’une réalité sociale qui obéit à des critères de race et de classe n’est pas résolu, nous devons continuer la lutte. Nous sommes dans une dynamique de changement et nous demandons simplement de ne plus être traités en serviteurs. C’est seulement en luttant que nous arriverons à la transformation sociale dans le respect et la dignité.

Y a-t-il une volonté de vous évincer de la scène syndicale en Guadeloupe avant cette échéance?
Soyons clair. Je n’ai aucune ambition politique, ou objectif à atteindre. Alors inutile de me barrer la route. C’est le peuple guadeloupéen qui décidera où il veut aller.

Laurence Parisot, à la tête du patronat français, a déclaré: «On sait que l'économie guadeloupéenne est KO. Comment voulez-vous que l'on s'engage?!» Que lui répondez-vous?
En Guadeloupe, le Medef ne représente même pas 4.000 salariés, comparé aux 46.000 salariés employés par les petites entreprises, et pourtant on n’entend que lui. Cela dit, je ne pense pas que Laurence Parisot ait une quelconque autorité sur le Medef guadeloupéen.

Je crois que les békés prennent seuls les décisions. Certains d’entre eux, par leur position intransigeante, ont conduit de nombreuses entreprises à quitter l’organisation patronale. Ainsi, la fédération du BTP, la chaîne Leader Price, Christian Viviès, ancien président du Medef de Guadeloupe, ont signé l’accord salarial. Par leur politique, ils n’ont réussi qu’à faire imploser le Medef.

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