21 novembre 2007

 

STOP ... à la propagande anti-grèves

Le syndicat SNJ du Parisien proteste contre la Une de mardi sur la grève
21.11.07 (AFP)

Le Syndicat national des journalistes (SNJ) du Parisien a protesté contre la Une du quotidien mardi, consacrée à la grève dans les transports, estimant qu'elle marque une "rupture avec la ligne éditoriale" du journal, dans un communiqué interne dont l'AFP a obtenu copie mercredi.

Mardi, le quotidien a publié en Une une photo des passagers patientant sur un quai bondé, sous le titre "Stop".

"En titrant +Stop+ (sous-entendu aux grèves), le Parisien s'oppose de front à toute une frange de son lectorat, au risque de se couper de lui", estime le SNJ, soulignant que le journal "a des lecteurs qui galèrent dans les transports et des lecteurs qui participent aux mouvements sociaux ou qui les soutiennent".

Le Parisien, "et c'est une rareté dans le paysage de la presse nationale", s'est "toujours positionné comme un journal d'information et non comme un journal d'opinion", rappelle-t-il.

"A travers cette Une qui éditorialise, on le colore d'un positionnement qui n'est pas le sien", juge-t-il.

"Il va de soi que le Parisien est, et restera, fidèle à la ligne éditoriale qui a toujours été la sienne, à savoir son indépendance, le refus des partis pris quels qu'ils soient et surtout, dans le cas qui nous préoccupe, à l'écoute des préoccupations de ses lecteurs", a réagi le directeur des rédactions du Parisien et d'Aujourd'hui en France, Vincent Régnier.

Le SNJ, qui est intervenu mardi en comité d'entreprise à ce sujet, doit rencontrer jeudi la direction de la rédaction.


Commentaire : La presse étant ce qu'elle est, on n'est pas surpris par des titres anti-grèvistes et des articles très orientés sur "la grogne des usagers" ou "les coûts des grèves pour l'économie". C'est rare qu'on parle du "coût" pour les cheminots de la baisse de leurs retraites ou les "coûts" pour les privilégiés - pardon, les salariés du secteur public - des réductions des effectifs.

De la même façon, les travailleurs les plus combatifs et le plus conscients des dangers de la politique sarkoziste sont décrits comme des "jusqu'auboutistes" (ceux qui veulent qu'on travaille 40, 41 et plus d'années pour toucher une misère de retraite et remplir les poches des assureurs privés ne le sont évidemment pas).

Quant aux infos sur les grandes chaînes de télévision, cela semble presque normal qu'on entend un intervieweur demander à un représentant syndical s'il va "prendre ses responsabilités" et appeler à la reprise du travail, ou quand on parle d'une baisse du nombre de grèvistes comme une "bonne nouvelle".

Personnellement, je n'ai jamais pu décider si les journalistes sont conscients de ce qu'ils disent, ou s'ils sont eux-mêmes victimes du bourrage de crâne général. Ou peut-être simplement stupides.

Le trotskiste anglais Tony Cliff, quand il parlait de l'état de la lutte de classe, au lieu de dire "le nombre de journées perdues" comme font tous les commentateurs bourgeois et tous les journalistes économiques, disait toujours "le nombre de journées gagnées dans les luttes".

Le langage est un terrain important de la lutte idéologique.

Les Assemblées générales bousculent la politique du gouvernement

Dans ce court article, Dimitris Fasfalis met le doigt sur une des questions fondamentales soulevées par les luttes : qui décide de la démarche à faire, et comment ? Les représentants atitrés des travailleurs, comme les permanents syndicaux, doivent-ils décider de l'arrêt ou pas d'un mouvement, des formes de lutte (blocages, piquets de grève, grèves tournantes etc.), des revendications à mettre en avant dans les négociations, de l'attitude à adopter face aux manoeuvres patronales et gouvernementales ? Ou est-ce les travailleurs eux-mêmes, réunis en Assemblées générales, souvent quotidiennement ?

Il est vrai que la majorité des représentants syndicaux font au moins semblant de "consulter la base", voire se remettent effectivement aux décisions des travailleurs - mais en tentant de les influencer directement ou par les médias interposés. Ils peuvent difficilement heurter frontalement la volonté des militants du rang, à moins de prendre le risque de se couper complètement de ceux qui font vivre l'organisation et paient les cotisations (et donc leurs propres salaires).

Mais les allusions dans leurs déclarations à la presse au "réalisme" ou à la "nouvelle situation" créée par la déclaration d'un ministre, les références aux difficultés des usagers et à la nécessité de garder le soutien du public, les appels à la "responsabilité" sont des signaux envoyés aux grèvistes qu'ils doivent mettre fin à leur mouvement et laisser la place aux négociateurs professionnels.

Certains dirigeants, comme François Chérèque de la CFDT, sont prêts à aller plus loin, et à appeler sans ambiguïté à arrêter le mouvement. Le rôle d'un Bernard Thibault est plus ambigü.

Ce qui est sûr est que les travailleurs n'ont aucun intérêt à donner un chèque en blanc à leurs dirigeants, qui doivent être clairement mandatés par la base. Idéalement, celle-ci doit pouvoir suivre les négociations en direct - comme ont fait les ouvriers polonais aux moments forts de la lutte du syndicat Solidarnosc -, pour éviter toute concession inutile ou arrangement secret.

Les AG sont un élément crucial de la démocratie ouvrière, tout comme les coordinations locales qui réunissent des militants de différents lieux de travail et d'autres secteurs en lutte. Nous sommes fiers de cette capacité des travailleurs de décider et d'agir collectivement, en toute indépendance. Quelque soit les résultats obtenus par une grève, l'expérience de cette prise de décisions est un acquis définitif.

La grève, les médias : petit exercice comparatif

Un article de la rédaction de la revue suisse A l'Encontre qui donne une large place à une tribune d'un camarade anglais, Mark Steel, qui tient une rubrique dans le quotidien The Independent.



TF1 : Le gouvernement vous parle

«La mobilisation syndicale se heurte à la volonté très claire du gouvernement de créer un système plus équitable de retraites, c’était dans le programme de Nicolas Sarkozy, il a été élu en partie pour ça.» Non, ce n’est pas du François Fillon, ni même du Xavier Bertrand, mais du Jean-Pierre Pernaut, ministre du 13 heures de TF1. Ça suinte de tous les sujets, de la hiérarchisation des JT, des mots choisis : la télé roule contre la grève. «La France peut-elle être réformée ?» se désespère Laurent Delahousse dimanche sur France 2. Quant à l’ineffable Jean-Marc Sylvestre, mercredi à 13 heures sur TF1, il sait : «Les syndicats ont compris que l’opinion publique ne les suivrait pas dans leur opposition systématique à une réforme in-con-tour-nable.»
Lire l'article dans Libération ...

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Comments:
"je n'ai jamais pu décider si les journalistes sont conscients de ce qu'ils disent, ou s'ils sont eux-mêmes victimes du bourrage de crâne général. Ou peut-être simplement stupides."

C'est vrai! c'est une question qui me laisse aussi perplexe, vraiment!
La presse actuelle (enfin celle du PPA, comme dit PLPL) se conduit comme une agence de propagande et de conditionnement des esprits...

ce n'est bien sûr pas innocent.


c'est sûr que le language, et même plus strictement le vocabulaire, est un terrain important de lutte idéologique...
 
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