11 mai 2008
Le facteur chez Drucker
NOUVEAU (26 juin 2008) : Olivier Besancenot devant ses juges médiatiques (sur le site d'Acrimed)
L'émission de Drucker avec Olivier Besancenot selon Reuters.
Bon, je n'ai pas tout regardé, mais ce que j'ai vu ne m'a pas fait changé d'avis. Je ne dis pas qu'il ne faut jamais participer à ce type d'émission. Il y avait des arguments pour. Besancenot devait "profiter d'une tribune" pour s'adresser à des millions de téléspectateurs et "faire la promotion" (le terme est malheureux) du nouveau parti anticapitaliste. A-t-il réussi ? A-t-il meme essayé ? En tout cas, suivant le principe même de l'émission, on a eu beaucoup sur Olivier Besancenot lui-même.
Le problème est que cette émission en particulier et son animateur-vedette projettent une image très forte qui, si on ne fait pas attention, colle forcément à l'invité. Besancenot est bien rentré dans le moule, se prêtant à tous les petits rituels qui font le charme de Drucker et répondant gentiment à des questions percutantes du genre "Et que faisiez-vous les dimanches quand vous étiez jeune ?"
On a bien eu droit à des reportages sur ses loisirs et sa tournée des potes et beaucoup de questions sur ses parents et son enfance. Chez Drucker, la famille est une valeur sure. Sur le racisme, nous avons eu droit à la petite main de SOS-Racisme et le très 'républicain' Devoirs de Mémoire (quelqu'un a parlé de la "communauté nationale"). Les interventions d'Alain Krivine n'ont pas tranché non plus avec l'ambiance un peu soporifique d'un dimanche après-midi chaud.
Musicalement, le choix d'inviter les deux chanteurs de l'ex-Zebda était bon, et Bernard Lavilliers pas mal. L'invitation faite à deux footballeurs très populaires, Franck Ribéry et Willy Sagnol, était moins heureuse, étant donné qu'ils n'avaient rien à dire à part que Besancenot était jeune et nouveau (!). On aurait préféré Lilian Thuram qui a d'excellentes idées et tape toujours très fort.
Christiane Taubira a loué les mérites de Besancenot de façon presque romantique et lui a prédit un bel avenir de parlementaire, sans qu'il ne bronche. Il est vrai que chez Drucker il faut toujours rester poli et dire le plus grand bien du maximum de personnes, et que Taubira est très populaire. Pour cela, Besancenot a été encore une fois un "bon client". Il y a eu quand même un moment fort, quand une ouvrière a parlé des mauvaises conditions du travail, les dangers de l'amiante et les salaires. J'en ai certainement raté d'autres.
Pour Arlette Laguiller, qui a été l'invitée de Drucker il y a dix ans, l'émission n'est pas dans le genre "people". Aujourd'hui, pour moi, cela y ressemblait beaucoup. Besancenot est vraiment très fort dans les débats contradictoires ou en face-à-face avec des journalistes politiques. Vivement Dimanche est un exemple du consensus bien-pensant, ce qui explique que si l'on se plie à toutes ses règles on se donne une image plutot ... consensuelle.
Voir sur Marianne2.fr : Seguela donne le baiser de la mort à Besancenot
Un petit compte-rendu dans Rouge, l'hebdo de la LCR
Et encore une fois, pour une critique radicale des médias, voir et participer au site d'ACRIMED ...
L'émission de Drucker avec Olivier Besancenot selon Reuters.
Bon, je n'ai pas tout regardé, mais ce que j'ai vu ne m'a pas fait changé d'avis. Je ne dis pas qu'il ne faut jamais participer à ce type d'émission. Il y avait des arguments pour. Besancenot devait "profiter d'une tribune" pour s'adresser à des millions de téléspectateurs et "faire la promotion" (le terme est malheureux) du nouveau parti anticapitaliste. A-t-il réussi ? A-t-il meme essayé ? En tout cas, suivant le principe même de l'émission, on a eu beaucoup sur Olivier Besancenot lui-même.
Le problème est que cette émission en particulier et son animateur-vedette projettent une image très forte qui, si on ne fait pas attention, colle forcément à l'invité. Besancenot est bien rentré dans le moule, se prêtant à tous les petits rituels qui font le charme de Drucker et répondant gentiment à des questions percutantes du genre "Et que faisiez-vous les dimanches quand vous étiez jeune ?"
On a bien eu droit à des reportages sur ses loisirs et sa tournée des potes et beaucoup de questions sur ses parents et son enfance. Chez Drucker, la famille est une valeur sure. Sur le racisme, nous avons eu droit à la petite main de SOS-Racisme et le très 'républicain' Devoirs de Mémoire (quelqu'un a parlé de la "communauté nationale"). Les interventions d'Alain Krivine n'ont pas tranché non plus avec l'ambiance un peu soporifique d'un dimanche après-midi chaud.
Musicalement, le choix d'inviter les deux chanteurs de l'ex-Zebda était bon, et Bernard Lavilliers pas mal. L'invitation faite à deux footballeurs très populaires, Franck Ribéry et Willy Sagnol, était moins heureuse, étant donné qu'ils n'avaient rien à dire à part que Besancenot était jeune et nouveau (!). On aurait préféré Lilian Thuram qui a d'excellentes idées et tape toujours très fort.
Christiane Taubira a loué les mérites de Besancenot de façon presque romantique et lui a prédit un bel avenir de parlementaire, sans qu'il ne bronche. Il est vrai que chez Drucker il faut toujours rester poli et dire le plus grand bien du maximum de personnes, et que Taubira est très populaire. Pour cela, Besancenot a été encore une fois un "bon client". Il y a eu quand même un moment fort, quand une ouvrière a parlé des mauvaises conditions du travail, les dangers de l'amiante et les salaires. J'en ai certainement raté d'autres.
Pour Arlette Laguiller, qui a été l'invitée de Drucker il y a dix ans, l'émission n'est pas dans le genre "people". Aujourd'hui, pour moi, cela y ressemblait beaucoup. Besancenot est vraiment très fort dans les débats contradictoires ou en face-à-face avec des journalistes politiques. Vivement Dimanche est un exemple du consensus bien-pensant, ce qui explique que si l'on se plie à toutes ses règles on se donne une image plutot ... consensuelle.
Voir sur Marianne2.fr : Seguela donne le baiser de la mort à Besancenot
Un petit compte-rendu dans Rouge, l'hebdo de la LCR
Et encore une fois, pour une critique radicale des médias, voir et participer au site d'ACRIMED ...
Comments:
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Là on n'est pas d'accord, camarade! Je crois que ta position tend à suggérer que le public qui regarde l'émission est incapable de démêler les ficelles pipolisées, et de séparer les paillettes de la personne, et la perssone des idées. Cela ne me semble pas forcément le cas. Qu'on demande à Besancenot ce qu'il faisait le dimanche quand il était jeune, c'est un petit prix à payer, pas très grave, pour pouvoir faire connaître davantage nos idées. Il ne s'agit pas d'ailleurs que de l'émission - tous les journaux écrivent sur ce sujet ce matin, et on s'en sort pas mal.
Je me rappelle quand Arlette Laguiller est passée à la télé chanter "mon petit loup" il y a douze ou quinze ans. Dans notre groupe, nous étions effroyablement sectaires, et nous nous amusions à siffler la mélodie en passant devant les vendeurs de "Lutte Ouvrière". Mais on a changé!
La mise en avant d'un individu n'a pas que des côtés négatifs, d'ailleurs, car justement l'idéologie dominante nous fait croire que les militants ne sont pas des êtres humains.
Dommage qu'on ait pas pu voir son fils, il doit être tout mignon :=)
Je me rappelle quand Arlette Laguiller est passée à la télé chanter "mon petit loup" il y a douze ou quinze ans. Dans notre groupe, nous étions effroyablement sectaires, et nous nous amusions à siffler la mélodie en passant devant les vendeurs de "Lutte Ouvrière". Mais on a changé!
La mise en avant d'un individu n'a pas que des côtés négatifs, d'ailleurs, car justement l'idéologie dominante nous fait croire que les militants ne sont pas des êtres humains.
Dommage qu'on ait pas pu voir son fils, il doit être tout mignon :=)
Dommage que tu sois pas d'accord avec moi, camarade.
Bien sur, l'émission est regardée par toutes sortes de personnes, dont beaucoup de travailleurs. Je suis d'accord aussi que le message peut passer, et que les gens savent faire la différence entre le coté variétés de l'émission et la partie plus politique.
Mais la forme est importante aussi. Besancenot assis sur le canapé rouge, au meme endroit que Céline Dion ou Geneviève de Fontenay, c'est une image forte. Savais-tu que juste derrière l'invité principal on place toujours de belles nanas qui sont payées pour sourire et applaudir, (je sais, parce que ma fille l'a fait) ? Beaucoup de gens savent qu'ils sont manipulés par les médias. Maintenant ils savent que Besancenot sait les utiliser à son propre avantage - mais en acceptant le cadre et les termes imposés par ces memes médias.
Si on participe à ce genre d'émission il faut faire le minimum pour mettre un baton dans les roues et empecher la machine de tourner comme d'habitude. Tout en restant poli, il aurait pu inviter par exemple non pas deux syndicalistes et un professeur de médecine pour parler des maladies professionnelles, mais tout un groupe de travailleurs ou de sans papiers en grève, ou bien des lycéens pour parler de leur revendications. Je trouve qu'il n'a pas cherché à utiliser toutes les possibilités de l'émission. C'était plutout une occasion ratée.
Quant au message lui-meme, je l'ai trouvé bien édulcoré, comme si Besancenot se laissait bercer par l'ambiance "tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil". Il est bien plus impressionnant quand il doit se battre pour avoir la parole ou quand il s'affronte à des gens de droite ou du PS.
Si je ne le connaissais pas, la principale leçon que j'aurais retiré en le regardant est que c'est un type gentil, sympa avec quelques bonnes idées. Globalement ce n'est pas si mal, mais un peu décevant quand meme. Et comme en plus il met une certaine distance entre lui et la tradition marxiste, ça ne va pas forcément dans le bon sens.
Quant aux réactions dans les médias, elles sont principalement du genre "ça y est, Besancenot est arrivé" ou "aujourd'hui la LCR fait partie du système". En d'autres termes, ce sont des gens qui se disent révolutionnaires par tradition, mais aujourd'hui ils ont appris à jouer par les memes règles que tous les autres partis (c'est un peu ce que vouilait dire Taubira).
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Bien sur, l'émission est regardée par toutes sortes de personnes, dont beaucoup de travailleurs. Je suis d'accord aussi que le message peut passer, et que les gens savent faire la différence entre le coté variétés de l'émission et la partie plus politique.
Mais la forme est importante aussi. Besancenot assis sur le canapé rouge, au meme endroit que Céline Dion ou Geneviève de Fontenay, c'est une image forte. Savais-tu que juste derrière l'invité principal on place toujours de belles nanas qui sont payées pour sourire et applaudir, (je sais, parce que ma fille l'a fait) ? Beaucoup de gens savent qu'ils sont manipulés par les médias. Maintenant ils savent que Besancenot sait les utiliser à son propre avantage - mais en acceptant le cadre et les termes imposés par ces memes médias.
Si on participe à ce genre d'émission il faut faire le minimum pour mettre un baton dans les roues et empecher la machine de tourner comme d'habitude. Tout en restant poli, il aurait pu inviter par exemple non pas deux syndicalistes et un professeur de médecine pour parler des maladies professionnelles, mais tout un groupe de travailleurs ou de sans papiers en grève, ou bien des lycéens pour parler de leur revendications. Je trouve qu'il n'a pas cherché à utiliser toutes les possibilités de l'émission. C'était plutout une occasion ratée.
Quant au message lui-meme, je l'ai trouvé bien édulcoré, comme si Besancenot se laissait bercer par l'ambiance "tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil". Il est bien plus impressionnant quand il doit se battre pour avoir la parole ou quand il s'affronte à des gens de droite ou du PS.
Si je ne le connaissais pas, la principale leçon que j'aurais retiré en le regardant est que c'est un type gentil, sympa avec quelques bonnes idées. Globalement ce n'est pas si mal, mais un peu décevant quand meme. Et comme en plus il met une certaine distance entre lui et la tradition marxiste, ça ne va pas forcément dans le bon sens.
Quant aux réactions dans les médias, elles sont principalement du genre "ça y est, Besancenot est arrivé" ou "aujourd'hui la LCR fait partie du système". En d'autres termes, ce sont des gens qui se disent révolutionnaires par tradition, mais aujourd'hui ils ont appris à jouer par les memes règles que tous les autres partis (c'est un peu ce que vouilait dire Taubira).
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