05 octobre 2007
Le retour du socialisme
par Benoît Renaud*
L’idée du socialisme, d’une société sans divisions de classes sociales, profondément démocratique, unissant toute l’humanité au-delà des frontières et des divisions de toutes sortes, est aussi ancienne que le capitalisme lui-même. Ce ne sont pas les idées marxistes qui sont la cause de la lutte des classes, mais bien l’inverse.
En ce début de siècle, les guerres à répétition éveillent une profonde aspiration vers la paix, la crise du climat nous fait prendre conscience de l’urgence de changer nos façons de produire et de consommer, et la pauvreté dans laquelle vit la majorité de l’humanité, et une minorité grandissante dans les pays riches, inspirent de nombreuses campagnes et mobilisations pour la justice sociale.
De plus en plus de gens prennent conscience du fait que les guerres impérialistes, la destruction de l’environnement et les inégalités sociales ne sont pas des accidents ou des anomalies, mais plutôt les résultats inévitables d’une manière bien spécifique d’organiser nos sociétés : le capitalisme. Lorsque la majorité des grandes décisions économiques et politiques sont prises par de petits groupes de possédants, comme à Montebello cet été au sommet nord-américain, on ne doit pas se surprendre du fait que les besoins de la majorité ont peu de poids. Lorsque la logique de la course mondiale aux profits guide les décisions des PDG et des gouvernements, la préservation des équilibres écologiques passe forcément au second plan. Lorsque la seule chose qui compte est d’écraser la concurrence par tous les moyens, il n’y a qu’un pas de la compétition économique à la guerre.
Dans les années 1970, le retour à la compétition féroce à l’échelle internationale, après une période atypique de domination étasunienne presque sans partage, força un grand virage vers la droite dans tous les pays du monde. Chaque classe dirigeante nationale cherche depuis lors à imposer à ses travailleuses et travailleurs des concessions qui n’en finissent plus au nom de la « compétitivité ». C’est ce qu’on appelle la mondialisation ou le néolibéralisme.
Ces politiques ont été introduites partout, mais pas sans résistance. La région du monde où la lutte contre le néolibéralisme a généré les mobilisations les plus grandes et les plus réussies est sans doute l’Amérique latine. Après une période de défaites brutales, souvent imposées par des régimes dictatoriaux appuyés par les États-Unis (avec la bénédiction du Canada), les mouvements de masse de ce continent, des associations paysannes aux nations autochtones en passant par les communautés des bidonvilles, ont relevé la tête les uns après les autres, changeant le paysage politique du continent à partir des années 1990. Du soulèvement zapatiste au Chiapas en 1994 à la commune de Oaxaca de l’an dernier, en passant par la mobilisation contre le coup d’État manqué contre Chavez en 2002 et la lutte contre la privatisation de l’eau en Bolivie, nous pourrions dresser une longue liste de mobilisations exemplaires et qui sont autant de sources d’inspiration.
En Europe, des mobilisations gigantesques contre les politiques néolibérales et contre la guerre ont également changé le paysage politique. Désormais, il existe une « gauche de la gauche » en rupture avec l’adaptation au néolibéralisme qui ronge les partis de gauche traditionnels, du Labour britannique au SPD Allemand. Québec solidaire est le seul exemple en Amérique du Nord impérialiste d’un nouveau parti de gauche cherchant à développer une alternative au néolibéralisme. Plus ce nouveau parti s’inspirera des meilleurs exemples de ce qui se fait en Europe et en Amérique Latine, plus il sera difficile de le faire dévier de sa trajectoire dans un sens social-libéral. Il se doit aussi d’être consistant dans son oppositions aux guerres et aux occupations au Moyen-Orient et au racisme qui vient avec ces campagnes colonialistes, comme en fait foi le délire islamophobe et xénophobe entourant les « accommodements raisonnables ».
Au Venezuela, on procède présentement à la fondation d’un nouveau parti politique de masse, le Parti socialiste unifié du Venezuela. Ce parti, qui regroupe tous les courants politiques et sociaux ralliés autour de la présidence de Hugo Chavez et du processus de la révolution bolivarienne, cherche explicitement à redéfinir le projet socialiste pour le 21e siècle. Situé au centre d’un vaste mouvement de résistance traversant le continent, ce nouveau processus politique pourrait relancer le mouvement international pour le socialisme, de la même manière que les mobilisations contre les sommets néolibéraux à partir de Seattle avaient relancé la critique du capitalisme et que l’opposition à la guerre en Iraq avait redonné une pertinence à l’anti-impérialisme. Mais cette fois-ci, il ne s’agit pas d’un mouvement négatif et en quelque sorte spontané (contre le néolibéralisme, contre la guerre…) mais d’un geste délibéré et positif pour une alternative.
Le socialisme n’arrivera pas par accident. La transformation en profondeur de nos façons de faire, de nos structures politiques et économiques, des relations entre les peuples et les continents, ne se fera pas sans l’organisation d’un mouvement explicitement dédié à cette transformation, et le ralliement de centaines de millions de personnes à ce projet. Le collectif Socialisme international de Québec solidaire vise à regrouper ceux et celles qui veulent travailler à la construction d’un tel mouvement ici et maintenant. Nous croyons que les valeurs qui unissent les milliers de membres de QS et les nécessités de la lutte contre le capitalisme réellement existant vont dans cette direction. En même temps, nous respectons la diversité des points de vues et l’existence d’une majorité non-socialiste au sein du parti dans la période actuelle. Si vous croyez qu’il faut en finir avec le capitalisme au plus vite, avant qu’il fasse encore plus de dommages à nos sociétés et à notre environnement, joignez-vous à nous et nous chercherons ensemble les meilleurs moyens de contribuer aux mouvements de résistance spécifiques et localisés en même temps qu’à la réinvention d’un projet de transformation global et radical.
* Benoît Renaud est membre de Socialisme International (Québec), un groupe qui fait partie de la section canadienne de l'International Socialist Tendency (connue en anglais sous le nom des International Socialists). Ce groupe est donc issu de la même tradition théorique et politique que Socialisme International (France), sans qu'il y ait des liens organisationnels entre nous. Nous le remercions de nous avoir envoyé son texte.
L’idée du socialisme, d’une société sans divisions de classes sociales, profondément démocratique, unissant toute l’humanité au-delà des frontières et des divisions de toutes sortes, est aussi ancienne que le capitalisme lui-même. Ce ne sont pas les idées marxistes qui sont la cause de la lutte des classes, mais bien l’inverse.
En ce début de siècle, les guerres à répétition éveillent une profonde aspiration vers la paix, la crise du climat nous fait prendre conscience de l’urgence de changer nos façons de produire et de consommer, et la pauvreté dans laquelle vit la majorité de l’humanité, et une minorité grandissante dans les pays riches, inspirent de nombreuses campagnes et mobilisations pour la justice sociale.
De plus en plus de gens prennent conscience du fait que les guerres impérialistes, la destruction de l’environnement et les inégalités sociales ne sont pas des accidents ou des anomalies, mais plutôt les résultats inévitables d’une manière bien spécifique d’organiser nos sociétés : le capitalisme. Lorsque la majorité des grandes décisions économiques et politiques sont prises par de petits groupes de possédants, comme à Montebello cet été au sommet nord-américain, on ne doit pas se surprendre du fait que les besoins de la majorité ont peu de poids. Lorsque la logique de la course mondiale aux profits guide les décisions des PDG et des gouvernements, la préservation des équilibres écologiques passe forcément au second plan. Lorsque la seule chose qui compte est d’écraser la concurrence par tous les moyens, il n’y a qu’un pas de la compétition économique à la guerre.
Dans les années 1970, le retour à la compétition féroce à l’échelle internationale, après une période atypique de domination étasunienne presque sans partage, força un grand virage vers la droite dans tous les pays du monde. Chaque classe dirigeante nationale cherche depuis lors à imposer à ses travailleuses et travailleurs des concessions qui n’en finissent plus au nom de la « compétitivité ». C’est ce qu’on appelle la mondialisation ou le néolibéralisme.
Ces politiques ont été introduites partout, mais pas sans résistance. La région du monde où la lutte contre le néolibéralisme a généré les mobilisations les plus grandes et les plus réussies est sans doute l’Amérique latine. Après une période de défaites brutales, souvent imposées par des régimes dictatoriaux appuyés par les États-Unis (avec la bénédiction du Canada), les mouvements de masse de ce continent, des associations paysannes aux nations autochtones en passant par les communautés des bidonvilles, ont relevé la tête les uns après les autres, changeant le paysage politique du continent à partir des années 1990. Du soulèvement zapatiste au Chiapas en 1994 à la commune de Oaxaca de l’an dernier, en passant par la mobilisation contre le coup d’État manqué contre Chavez en 2002 et la lutte contre la privatisation de l’eau en Bolivie, nous pourrions dresser une longue liste de mobilisations exemplaires et qui sont autant de sources d’inspiration.
En Europe, des mobilisations gigantesques contre les politiques néolibérales et contre la guerre ont également changé le paysage politique. Désormais, il existe une « gauche de la gauche » en rupture avec l’adaptation au néolibéralisme qui ronge les partis de gauche traditionnels, du Labour britannique au SPD Allemand. Québec solidaire est le seul exemple en Amérique du Nord impérialiste d’un nouveau parti de gauche cherchant à développer une alternative au néolibéralisme. Plus ce nouveau parti s’inspirera des meilleurs exemples de ce qui se fait en Europe et en Amérique Latine, plus il sera difficile de le faire dévier de sa trajectoire dans un sens social-libéral. Il se doit aussi d’être consistant dans son oppositions aux guerres et aux occupations au Moyen-Orient et au racisme qui vient avec ces campagnes colonialistes, comme en fait foi le délire islamophobe et xénophobe entourant les « accommodements raisonnables ».
Au Venezuela, on procède présentement à la fondation d’un nouveau parti politique de masse, le Parti socialiste unifié du Venezuela. Ce parti, qui regroupe tous les courants politiques et sociaux ralliés autour de la présidence de Hugo Chavez et du processus de la révolution bolivarienne, cherche explicitement à redéfinir le projet socialiste pour le 21e siècle. Situé au centre d’un vaste mouvement de résistance traversant le continent, ce nouveau processus politique pourrait relancer le mouvement international pour le socialisme, de la même manière que les mobilisations contre les sommets néolibéraux à partir de Seattle avaient relancé la critique du capitalisme et que l’opposition à la guerre en Iraq avait redonné une pertinence à l’anti-impérialisme. Mais cette fois-ci, il ne s’agit pas d’un mouvement négatif et en quelque sorte spontané (contre le néolibéralisme, contre la guerre…) mais d’un geste délibéré et positif pour une alternative.
Le socialisme n’arrivera pas par accident. La transformation en profondeur de nos façons de faire, de nos structures politiques et économiques, des relations entre les peuples et les continents, ne se fera pas sans l’organisation d’un mouvement explicitement dédié à cette transformation, et le ralliement de centaines de millions de personnes à ce projet. Le collectif Socialisme international de Québec solidaire vise à regrouper ceux et celles qui veulent travailler à la construction d’un tel mouvement ici et maintenant. Nous croyons que les valeurs qui unissent les milliers de membres de QS et les nécessités de la lutte contre le capitalisme réellement existant vont dans cette direction. En même temps, nous respectons la diversité des points de vues et l’existence d’une majorité non-socialiste au sein du parti dans la période actuelle. Si vous croyez qu’il faut en finir avec le capitalisme au plus vite, avant qu’il fasse encore plus de dommages à nos sociétés et à notre environnement, joignez-vous à nous et nous chercherons ensemble les meilleurs moyens de contribuer aux mouvements de résistance spécifiques et localisés en même temps qu’à la réinvention d’un projet de transformation global et radical.
* Benoît Renaud est membre de Socialisme International (Québec), un groupe qui fait partie de la section canadienne de l'International Socialist Tendency (connue en anglais sous le nom des International Socialists). Ce groupe est donc issu de la même tradition théorique et politique que Socialisme International (France), sans qu'il y ait des liens organisationnels entre nous. Nous le remercions de nous avoir envoyé son texte.
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